mercredi 27 mai 2009

Tout Est Ecrit, mon premier roman

Aujourd'hui, le premier chapitre de mon petit roman pour vous!
Il est un peu long, je souhaite bonne lecture aux courageux!


Heureux l’homme qui ne marche pas,
Selon le dessein des méchants.
(Ps. 1-1)


Sur terre, il existe des êtres extraordinaires. Leur gentillesse, l’amour et l’attention qu’ils portent à leur prochain n’ont pas leur pareil.
Plus ils font du bien autour d’eux, plus leur prospérité est grande.
Jamais ils ne se plaignent, car leur cœur déborde de sagesse.
Malgré le côté obscur que possède tout homme, nulle fourberie n’exposera leur âme.
Car ils ont en horreur toutes malveillances.
Toute leur vie, ils suivront avec humilité leurs principes.
Car l’amour et l’énergie positive qu’ils dégagent sont les outils essentiels à l’accomplissement de leurs œuvres humanitaires.

La haine engendre violence et désolation !
La bonté cultive l’amour, l’entendement et le discernement !



Chapitre I

Par un après-midi de printemps bien ensoleillé, de sa voiture, Gabrielle souriait à sa douce mamie qui lui faisait des signes en guise d’au revoir. Le visage rayonnant, elle contemplait avec fascination ce joli tableau grandeur nature qui se déployait devant elle. En effet, sa grand-mère se tenait là, debout près de la véranda, au milieu de ses rosiers généreusement ornés de magnifiques roses aux multiples couleurs.
Elle jeta malgré elle un dernier regard à ce merveilleux décor qui, à coup sûr, donnerait envie à tous les amoureux de la nature de l’immortaliser à jamais. Tout en faisant un dernier signe de la main à Yaya, elle fit démarrer sa voiture, qui disparut au bout de l’allée.

Gabrielle quittait ce charmant petit village lorrain près de Metz et sa tendre grand-mère, qu’elle appelait Yaya. Elle aimait énormément sa douce mamie, d’autant que son aïeule était tout ce qui lui restait comme famille. Si elle vivait encore dans la région parisienne, c’était essentiellement pour sa grand-mère. Et tant que Dieu prêterait vie à Yaya, jamais elle ne s’en éloignerait ! Pourtant, elle savait que son avenir était ailleurs.
Gabrielle était véritablement persuadée qu’une voie extraordinaire lui était tracée. Depuis quelques temps, elle ressentait qu’un vent de liberté lui soufflait dans le dos. Et ce souffle magique lui donnait l’impression que ses pieds allaient quitter le sol.

Depuis sa plus tendre enfance, sa mamie a toujours été sa joie de vivre. Avec Clothilde, sa sœur aînée, qui était en réalité sa cousine germaine, elles avaient toujours vécu tous ensembles. Gabrielle et Clothilde passaient la plupart de leur temps chez Yaya et papi Jo, ce qui était tout à fait normal, puisque la maison de leurs parents se situait à cent mètres de celle de leurs grands-parents. La famille était très soudée.

Mais malheureusement, un jour, leurs parents périrent dans un tragique accident de voiture. Gabrielle n’avait alors que seize ans et Clothilde dix-sept. Ce fut dans les bras de Yaya et papi Jo qu’elles trouvèrent le réconfort dont elles avaient besoin. Heureusement qu’ils étaient là pour leur donner du courage, les entourer d’amour et d’affection, ce fut grâce à leurs grands-parents qu’elles purent surmonter cette terrible épreuve. Quant à Papi Jo, cela faisait une bonne quinzaine d’années qu’il les avait quittées. Mais son souvenir restera à jamais gravé dans son cœur.

Gabrielle allait retrouver son petit appartement douillet, qu’elle avait décoré avec amour. Ce charmant petit pied-à-terre était pour elle le bout du monde, son havre de paix. Confortable, chaleureux, accueillant, il était parfait pour méditer, pour s’adresser à Celui-qui-est, qu’elle adorait tant. Son cœur généreux et débordant d’amour lui apportait sagesse et sérénité. Elle ne débutait pas sa journée sans rendre grâce au ciel. Car, infailliblement, elle savait où elle allait et ce qu’elle attendait de la vie.

Comme tout le monde, Gabrielle avait eu à faire face un jour aux mauvaises surprises de la vie ! Mais, à chaque fois, une force vivifiante et combative était venue renforcer son incroyable détermination. Alors, avec humilité et sans relâche, elle continuait à aller de l’avant, sans jamais se poser de questions, parce que son optimiste était sans limites. D’ailleurs, ses amis l’avaient toujours qualifiée d’utopiste, mais c’était sa façon d’être.

Du plus profond de son âme, Gabrielle nourrit un rêve : Celui de voir un jour le bonheur sur le visage de chacun, que les hommes vivent tous dans une formidable et parfaite harmonie malgré ce sombre et inquiétant dessein que projette ce monde impitoyable.
Elle avait acquis cette résolution au cours d’un extraordinaire rêve, qu’elle avait fait à l’aube de ses dix ans. Depuis, elle avait été à jamais transformée par ce songe. Oui ! Après cette nuit magique, elle n’avait plus été la même, elle était devenue une autre Gabrielle. Oui ! Elle avait compris ce message, qui lui disait tout simplement : « L’amour et la bonté seront à jamais la moisson de ton cœur, car ton âme est généreuse. » Depuis, elle n’avait jamais mis en doute les paroles que cet être auréolé de lumière était venu lui dire.

Aujourd’hui encore, c’est avec allégresse qu’elle accomplit ses œuvres, en aidant son prochain avec force et détermination. Ces gestes ; elle les attend de ses contemporains, c’est à dire : que nul n’hésite à faire du bien autour de lui, faire des gestes charitables envers ceux qui sont dans le besoin, aider les étrangers qui tendent la main, vivre bien avec ses semblables. Mais, par-dessus toutes choses, ne jamais rester indifférent aux autres !
Gabrielle est véritablement persuadée que, depuis l’origine de l’humanité, l’homme, d’instinct, est né pour vivre en communauté. Parce qu’il ressent un besoin fondamental d’aimer et d’être aimer, d’aider et de partager, car c’est cela l’adrénaline qui active le flux existentiel de son âme. En effet, l’âme est plus que jamais à la recherche de paix et de sérénité. Hélas, beaucoup ont enfoui au plus profond de leur être cette formidable raison de leur existence sur cette terre, le vrai sens de la vie, pensait-elle inlassablement.
Depuis de nombreuses années Gabrielle a toujours suivit ce que lui dicte son cœur et elle agit sans aucune hésitation. Parce que son cœur et son esprit fonctionnent à l’unisson et c’est cela qui réjouit son âme. Car elle se sait guidée dans toutes ses décisions.

Gabrielle exerce le métier d’infirmière et elle sait que ce noble métier est l’image de la générosité. Elle est satisfaite de son travail, parce que, tous les jours, elle pratique exactement les actes qui contribuent à renforcer sa foi. Et ces gestes qu’elle accomplit au quotidien, lui rappelaient les béatitudes. Oui ! Ces extraordinaires paroles que le Christ prononça un jour sur une montagne à tous ceux et celles qui étaient venus là afin de l’écouter.

Depuis quelque temps Gabrielle ressentait que quelque chose changeait en elle, c’était comme si elle se métamorphosait. Aussi, tout cela la persuadait qu’elle pouvait aller encore plus loin dans ses actes de tous les jours vis-à-vis des autres et cela la rendait encore plus forte ! Cependant, elle ne savait pas comment faire pour atteindre cet idéal, parce qu’en vérité, son but était d’arriver à une conversion vraie et perpétuelle.
Epanouie et d’une mansuétude infinie Gabrielle était bien dans son corps. Là où elle se trouvait, elle s’y installait en toute confiance, car elle se sentait toujours à sa place. Elle était spontanée, généreuse et douée d’une étonnante douceur. Elle inspirait la confiance, elle attirait les autres, elle interpellait et séduisait tous ceux et celles qui la côtoyait, car d’extraordinaires ondes positives se dégageaient de sa personne. De plus, elle était aussi dotée de ce petit quelque chose qui lui donnait cet air mystérieux et fascinant à la fois.
Il suffisait de la regarder pour tomber sous le charme de son joli visage au regard doux. De ses yeux irradie une grande chaleur, de son sourire se dégage quelque chose que l’on n’arrive pas à décrire, mais qui néanmoins suscite beaucoup d’intérêt. Certes, sur ses traits angéliques, tellement vrais et authentiques, on ne peut qu’apercevoir le reflet de son âme.
Dès que Gabrielle le pouvait, elle partait pour Metz, même si ce n’était que pour deux jours, elle y allait. Cela lui suffisait pleinement, c’était un besoin vital pour elle d’être auprès de sa mamie.
Sa grand-mère son rayon de soleil, sa joie, sa source vive, son bonheur, son équilibre, elle avait tellement d’affection pour ce petit bout de femme!
Lorsqu’elle revenait de chez Yaya, elle avait toujours cet air réjoui et épanoui. Et à chaque fois elle se retrouvait dans cet état d’esprit, parce qu’elle était tout simplement remplie d’amour ! .

Donc, ce jour-là, elle reprenait la direction de la porte des Lilas. Elle était vraiment pressée de rentrer. Elle savait qu’elle en avait pour trois heures et quelques minutes de route. Aussi, elle s’était décidée à partir plus tôt, elle voulait absolument arriver assez tôt à Paris. Elle voulait rendre visite à sa vieille amie Odette.

Odette était une petite dame d’un certain âge qui n’habitait pas loin de chez elle. Avant de partir pour Metz, Gabrielle lui avait rendu visite et elle lui avait trouvé le visage tellement fatigué, qu’elle l’avait quitté avec regret, en lui recommandant vivement de bien prendre soin d’elle, et, surtout, de boire beaucoup d’eau.
Maintenant qu’elle y pensait sérieusement, Gabrielle était doublement inquiète. D’autant que, durant tout le week-end, Odette était restée présente dans ses pensées. Elle avait vraiment hâte d’arriver à Paris pour prendre de ses nouvelles. Puis, après avoir rendu visite à sa chère amie, elle se rendrait à l’hôpital où elle travaillait. Elle voulait faire un grand coucou à ses petits malades, mais elle voulait surtout revoir ce petit bonhomme qui avait été admis dans son service, juste au moment où elle allait quitter son travail.
Lorsqu’elle avait aperçu cet enfant, qui était arrivé dans l’hôpital accompagné de ses parents, elle était tombée en admiration devant son joli minois. D’instinct, elle avait ressenti quelque chose d’exceptionnel en dévorant des yeux ce petit garçon. Aussi, elle avait détecté dans son regard une incroyable intelligence.
Il devait avoir sept ou huit ans, elle l’avait trouvé rayonnant. Il était véritablement radieux, on aurait dit un petit ange égaré, ses yeux et ses cheveux étaient dorés. Son regard était dans le vague, il était comme un oisillon privé de s’envoler à cause d’une aile cassée.
C’était systématique chez Gabrielle, dès qu’elle voyait un enfant malheureux, c’était tout son être qui souffrait. Et cette souffrance était viscérale. En effet, lorsqu’elle voyait leurs yeux tristes et pleins de larmes, son âme était à chaque fois en émoi. Néanmoins, en ce qui concernait ce petit garçon, ce n’était pas exactement ce qu’elle avait vu. Mais, elle voulait le revoir, afin de faire plus ample connaissance avec lui.
Il n’y avait rien d’étonnant à ce que Gabrielle compte se rendre à son travail malgré son jour de repos, parce qu’elle y passait la plupart de son temps. Durant des années, elle avait travaillé la nuit, comme cela, elle pouvait consacrer plus de temps aux autres durant la journée. De plus, comme elle faisait du bénévolat dans plusieurs associations, cela lui permettait de rendre visite aux patients dans les hôpitaux et, bien entendu, son service en faisait partie.

Cela faisait maintenant quatre ans qu’elle avait décidé de retravailler le jour. Malgré tout, elle trouvait toujours du temps à donner aux autres, surtout aux enfants, dont elle aimait tant s’occuper. Gabrielle les aimait tellement, qu’ils étaient devenus sa principale préoccupation. Ainsi, elle avait décidé que, durant toute sa vie, elle serait au service de ces petits êtres si fragiles et si forts à la fois. Ces merveilleuses petites âmes qui étaient le devenir de l’humanité.
Jusqu’à ce jour, elle n’avait pas failli à sa parole. Certes, elle n’oubliait personne, mais lorsqu’elle était entourée de ces petits êtres, leurs cris de joie et leurs éclats de rire valaient pour elle toutes les richesses du monde. C’était du bonheur pur et son cœur battait si fort dans sa poitrine, qu’il n’y avait aucun doute dans son esprit, c’était bien cela qu’on appelait la félicité. Oui ! De l’amour pur, une bénédiction, elle était aux anges et rien d’autre ne comptait pour elle. Leur vie était sa vie et elle savait profiter de chaque instant présent. Lorsqu’elle se trouvait en leur compagnie, seul leur bien-être et leur bonheur avaient de l’importance à ses yeux.

Gabrielle, qui d’habitude ne regardait jamais en arrière, ne savait pas pourquoi, mais, depuis peu, son passé resurgissait. Elle revoyait ses amis de toujours préoccupés pour son avenir. Ils la trouvaient tellement solitaire, qu’ils avaient essayé toutes sortes de stratagèmes pour la marier. Elle les avait bien vite découragés, perspicace et conciliante comme elle l’était, toutes leurs ruses bien-pensantes l’avaient plutôt amusée.
Depuis de nombreuses années, elle a bien pris conscience qu’elle fait partie de ceux qui savent ce qu’ils attendent ici-bas. Aussi, rien ne doit venir perturber sa douce vie. Elle sait comment gérer la sienne et tant qu’elle se sentira portée, il en sera ainsi. De plus, elle n’a rien à prouver à personne, parce qu’elle est tout simplement elle-même et c’est ce qui compte le plus dans ce monde : toujours rester soi-même, authentique et vrai.

D’après les dires de ses proches, Gabrielle est une belle fille et elle a tout pour trouver son prince charmant : un corps magnifique, des cheveux volumineux, noirs et soyeux, qui tombent en cascade sur son dos. Sur son doux visage, deux yeux couleur agate accentuent l’extraordinaire douceur de son regard angélique, un chaleureux sourire vient signifier toute la poésie de sa grandeur d’âme.
Effectivement, il n’y a rien à dire, c’est une personne tout en charme et elle possède entre autres, cette aura qui lui procure tant d’aisance. Elle donne toujours le meilleur d’elle-même, comme toutes ces bonnes âmes qui se dévouent pour le bien-être de leur prochain. Son discernement et sa clairvoyance lui ont permis d’acquérir une certaine philosophie sur la vie. Et sa façon de vivre est la preuve qu’elle a bien compris ce pourquoi elle est dans ce monde. Pour : aimer, aider, tolérer et ne jamais juger. Et c’est ça la véritable source de sagesse pour elle.
En la vie ! elle a une confiance infaillible, car cette force intérieure qui la pousse et qui guide ses pas, ses pensées et ses décisions ne peut-être que le souffle de la vérité.
Ainsi, elle ne se pose jamais de questions, elle se contente de laisser faire les choses. Elle est tellement positive dans ses pensées, que rien ne peut-être autrement que ce qui a été décidé pour chacun. Et ce joli proverbe vient confirmer ses pensées : « Ce qui est pour toi, la rivière ne l’emporte pas. »

Pourtant, un jour, l’amour s’était présenté à elle, mais son cœur, déjà tellement ouvert à tous, n’avait pu ressentir qu’un sentiment fraternel pour le jeune homme. Ce n’était pas qu’elle refusait d’aimer passionnément, mais son âme avait décidé tout autre chose.
Gabrielle était encore très jeune, lorsqu’elle fit la connaissance de Benjamin. C’était un jeune interne à l’hôpital où elle faisait ses études d’infirmière. Il était charmant, intelligent, humble et dévoué à son travail. Il avait toutes les qualités qui faisaient de lui un jeune homme presque parfait. D’emblée et sans équivoque, elle l’avait aimé de cet amour pur, fraternel, puisque son cœur avait fait abstraction de tout sentiment amoureux.
Malgré tout le charme que dégageait ce garçon, rien ne devait venir changer sa façon de penser. Car son grand amour restera à jamais pour Celui-qui-n’a-pas-de-nom.
Elle savait du plus profond de son être qu’elle avait des choses merveilleuses à accomplir et de formidables aventures à vivre. Alors, il n’était pas question de gâcher cette extraordinaire destinée qui s’offrait à elle par une quelconque futilité ! Même si celle-ci avait le visage ou le corps d’un apollon !
Lorsqu’elle se retrouvait dans un ascenseur avec un jeune interne, il lui arrivait de sourire, parce que les souvenirs de sa rencontre avec Ben ressurgissaient.
Oui, ce jour formidable où il avait fait irruption dans sa vie avait été quelque chose de magique et jamais elle n’oublierait cette amitié intense, ce grand bonheur qu’il lui avait apporté. Elle avait l’impression que tout cela s’était passé la veille.
Gabrielle était encore à l’école d’infirmières, c’était au moment où elle effectuait son stage dans le service de pédiatrie. Elle ne savait pas pourquoi, mais, ce jour-là, elle avait ressenti quelque chose de positif planer dans l’air. Et cette atmosphère lui avait apporté une agréable sensation de bien-être, elle était euphorique.

C’était très exactement un mardi matin ; elle allait prendre son service au troisième étage et elle attendait l’ascenseur. Elle était joyeuse et particulièrement heureuse en cette merveilleuse journée, parce qu’elle était dans le service des tout-petits et ces petits êtres la fascinaient déjà. Dans son excitation, elle n’avait prêté aucune attention à l’arrivée de l’ascenseur et lorsque les portes de celui ci s’étaient ouvertes, elle y avait pénétré machinalement, tête baissée, sans regarder devant elle. Et c’était alors qu’elle avait entendu ce cri, qui l’avait fait sursauter et qui l’avait bouleversée :
– Mais enfin, que faites-vous ! Regardez où vous allez, mademoiselle ! vous avez vu le résultat ? Eh bien ! merci pour ma blouse !
– Oh! Mon Dieu ! Excusez-moi, je vous demande pardon, je suis désolée, vraiment !
– Le mal est fait, n’en parlons plus, si vous le voulez bien !
Comme elle avait été gênée, la pauvre Gabrielle, de voir cette blouse blanche maculée de café ! Elle avait été tellement mal à l’aise, qu’elle n’était plus arrivée à relever la tête. Alors, elle s’était mise à regarder ses pieds en se reprochant : « Une personne d’habitude si attentionnée que toi, comment as-tu pu commettre quelque chose d’aussi maladroit ? » Elle s’en voulait terriblement. Lorsque l’ascenseur s’était arrêté au troisième étage, elle avait relevé la tête malgré elle, pour encore une fois s’excuser. Et c’était là qu’elle avait remarqué son incroyable beauté et son regard troublant.
– Encore une fois, je vous prie d’accepter toutes mes excuses, je suis vraiment désolée !
– Ce n’est rien ! Après tout, ce n’est qu’une blouse, mademoiselle. Et j’accepte vos excuses, si vous acceptez de prendre un café ou, peut-être, de dîner un de ces soirs avec moi.
Gabrielle avait été troublée malgré elle par ces grands yeux magnifiques, couleur lagon du pacifique, cette douceur dans le regard, cette voix chaude et profonde. Oui, pour la première fois de sa vie, et cela pendant quelques secondes, elle n’avait plus été elle-même. Elle, d’habitude si forte, avait, durant un laps de temps, perdu toute sa sérénité. Elle était loin de se douter qu’un jour un jeune homme viendrait lui faire perdre le contrôle de ses pensées, ne serait-ce qu’un instant de sa vie ! Malgré tout, il n’y avait rien de mal à être un jour plus ou moins séduite par un beau visage. Elle avait été tellement troublée, qu’elle avait eu beaucoup de mal à retrouver son calme pour lui répondre d’un ton serein :
– Je… je… Si vous le souhaitez, nous en reparlerons. À bientôt !
– À très bientôt, mademoiselle. Je vois que vous êtes chez les prématurés, alors je sais où vous trouver. Au plaisir, mademoiselle !
Elle ne savait pas pourquoi, mais elle avait eu envie de revoir ce jeune homme. Bien sûr, elle savait pertinemment que ce qu’elle ressentait pour lui n’avait rien de physique, que c’était plutôt purement intellectuel. Mais, d’emblée, elle avait souhaité que cette amitié naissante soit forte et durable.
Le soir même, Ben s’était présenté dans le service pour l’inviter à dîner. Elle avait refusé, car elle avait déjà prévu de faire autre chose. Mais elle s’était rattrapée bien vite, en lui promettant qu’avant la fin de la semaine ils dîneraient ensemble.
Le lendemain après-midi, il était revenu à la charge. Elle avait hésité un instant, puis elle avait fini par accepter. Et, à son tour, Gabrielle l’avait invité à prendre un café, ce qu’il avait accepté sans aucune hésitation. Et c’était ainsi qu’elle s’était rendue à la cafétéria avec ce jeune homme. Il avait profité de l’occasion pour se présenter et faire plus ample connaissance avec elle. Et, bien évidemment, cela avait été l’opportunité pour lui de réitérer son invitation à dîner. Gabrielle, qui était déjà sous son charme, avait fini par accepter. Ainsi, ils s’étaient mis d’accord sur le jour et l’heure du dîner. Puis, après avoir échangé quelques banalités, ils avaient repris le couloir qui les menait vers leurs services. Tout naturellement, Gabrielle avait pris le temps de lui montrer le bâtiment gris qui se trouvait juste derrière l’hôpital, en lui précisant que c’était le foyer de l’école et que c’était là qu’elle résidait.
Benjamin avait réservé une table dans un restaurant à Saint-Germain-des-Prés. Le choix du lieu avait enchanté Gabrielle, d’autant plus qu’elle n’y avait jamais mis les pieds. Elle connaissait de réputation ce vivant et palpitant quartier de Paris, celui qui avait été jadis le lieu de prédilection d’illustres hommes politiques, d’écrivains et d’artistes.
Ils s’étaient installés dans ce magnifique restaurant situé sur la place Saint-Germain-des-Prés où, d’ailleurs, certains aimaient se rendre dans le seul but d’y être vus et reconnus !
Elle avait été vraiment charmée par ce décor vieillot. Une chaleur conviviale embrasait les lieux, l’atmosphère, les murs semblaient être encore chargés des empreintes de ces exceptionnels convives. Elle avait véritablement ressenti de fortes ondes, quelque chose de vibrant et de magique qui se dégageait de cet endroit. Tout cela l’avait impressionnée et interpellée à la fois.
Ce soir-là, Gabrielle avait été terriblement troublée. Car, mis à part l’endroit, elle avait découvert un garçon merveilleux, attentionné, sympathique, qui l’avait étonnée par sa grande générosité. Elle avait été pleinement satisfaite et très heureuse, parce qu’elle venait de se faire un formidable ami.
Benjamin lui avait décrit son parcours jusqu’à son internat dans cet hôpital, ses grands projets pour la pédiatrie. Ils avaient ce point commun : leur passion pour les enfants.
Après cette première sortie, ils étaient devenus inséparables. Tous les jours Ben lui rendait visite. À l’heure du déjeuner, dès qu’il le pouvait, il ne manquait jamais de venir la chercher pour manger avec elle.
Cependant, et malgré elle, Gabrielle avait commencé à se sentir envahie. Ben cherchait sa compagnie. Mais il était tellement gentil et charmant qu’elle n’arrivait pas à lui faire comprendre que leur relation devait rester strictement amicale. Elle avait réalisé que, de son côté, elle aussi appréciait beaucoup sa compagnie. Elle était ravie de l’avoir comme ami, elle se sentait tellement bien en sa présence !
Ils étaient jeunes, intelligents et heureux, comme beaucoup de jeunes de leur âge. Cependant, il y avait quelque chose de curieux qui se produisait lorsqu’elle se trouvait quelques fois à côté de Ben. C’était une agréable chaleur qui émanait de son cher ami et qui, furtivement, parcourait par la suite tout son être. Tout cela réveillait ses sens et la mettait en émoi, à ces moments-là, elle éprouvait une merveilleuse et troublante sensation. Elle était à chaque fois gênée, d’autant plus qu’avant qu’elle ne fréquentât Benjamin, jamais elle n’avait vécu ou ressenti un tel épanouissement. Elle avait tenu à garder se secret enfoui en elle, d’autant qu’aucun signe troublant ne semblait marquer son visage. Même Ben n’avait pas semblé remarquer son trouble, ce bien-être extraordinaire qu’il lui procurait.
Benjamin lui apportait tellement de bonheur dans sa vie ! Ils avaient tellement de choses en commun, qu’elle n’avait pas voulu perdre son amitié. Ils étaient dotés de la même détermination, ils avaient le même avis en ce qui concernait l’éducation des enfants.
Malheureusement, elle savait que cette amitié était trop parfaite pour que cela dure très longtemps. Gabrielle avait commencé à ressentir un étrange malaise et elle n’avait pas compris ce qui lui arrivait. C’était qu’elle aussi s’était sentie attirée malgré elle par son ami et ce qui se passait en elle l’avait perturbée terriblement. Cette faiblesse l’avait déstabilisée, elle semblait perdre pied.
Pourtant, lorsqu’elle avait rencontré Benjamin, elle avait su pertinemment ce qu’il risquait de se produire si elle ne gardait pas une certaine réserve vis-à-vis de ce jeune homme. Aussi, d’instinct, elle avait essayé de mettre une barrière entre eux. Gabrielle voulait protéger son cher ami, parce qu’elle ne voulait le voir tomber amoureux. « Il serait tellement regrettable pour lui de gaspiller son énergie dans un amour à sens unique », pensait-elle.
Gabrielle était véritablement persuadée qu’elle avait fait tout ce qu’il fallait pour préserver Benjamin. D’ailleurs, elle n’avait jamais encouragé son ami à commencer une idylle avec elle, pas une seule fois elle ne lui avait fait comprendre qu’elle comptait vivre une quelconque aventure amoureuse avec lui. Durant leurs longues discussions, elle lui avait répété sans cesse qu’elle le considérait comme un bon ami. Elle avait toujours fait en sorte que rien d’équivoque ne vînt troubler ce merveilleux sentiment qu’elle éprouvait pour lui. Cestes, Benjamin n’était pas au courant de ses rêves, et encore moins de sa formidable dévotion. Alors, comme un jeune fougueux, il s’était lancé à corps perdu dans une passion amoureuse.
Ainsi, tous ses efforts pour repousser Benjamin avaient été vains. L’amour s’était installé dans le cœur de Benjamin et ce qu’il ressentait pour Gabrielle était devenu si fort, que rien n’avait pu l’arrêter. La terrible souffrance qu’elle percevait dans les yeux de son ami la déstabilisait. Pauvre Ben ! Tellement gentil et attentionné ! Quel dommage, tout allait pourtant si bien !
Elle, qui rêvait que cette amitié se prolongeât dans le temps, avait vu malheureusement que tout se terminerait plus vite qu’elle ne le souhaitait. Néanmoins, elle avait voulu que tout cela se fît avec beaucoup de diplomatie. Elle ne voulait pas froisser ni atteindre son ami dans son amour propre. De même qu’elle ne voulait pas le voir partir sans qu’il ne sût qui elle était vraiment.
Dès lors, elle avait ressenti une grande tristesse, parce qu’elle avait su qu’elle perdrait son ami définitivement. C’était un fait : elle n’avait pas été assez vigilante, s’était-elle reproché sans cesse. Elle n’avait plus supporté le mal-être de son ami, toute cette tristesse qu’elle lisait dans ses yeux l’a rendait trop malheureuse.
Gabrielle avait longtemps culpabilisé, parce qu’elle savait qu’elle avait eu une grande part de responsabilité dans cette malheureuse histoire. Elle avait été désolée, surtout qu’elle avait ressenti toute la souffrance de son ami.
Cher Ben, comme elle l’avait aimé et comme son amitié lui avait été précieuse ! Mais, pour le bien de tous, elle avait dû cesser toute relation. Ça avait été le prix à payer, aussi bien pour elle que pour lui.
Il y a une chose extraordinaire chez Gabrielle, c’est que tout problème a une solution pour elle, même ceux que l’on trouve quelque fois insurmontables. C’est qu’elle est dotée d’un sang-froid et d’une telle détermination, que la force et les arguments ne lui ont jamais fait défaut. Ainsi, à chaque fois, elle trouve les mots justes. C’est comme cela qu’elle réussit à faire entendre raison à tous ceux et celles qui l’écoutent avec attention.
Elle était vraiment déconcertante, en effet, armée de son calme et de sa confiance, les choses s’arrangeaient toujours dans une parfaite cordialité.
En ce qui concernait son ami, Gabrielle n’avait ressenti aucune appréhension, car elle savait qu’en parlant en toute franchise à Benjamin, il la comprendrait. Elle le savait intelligent et magnanime, même si le moment serait pour lui une terrible épreuve.
Le temps avait passé si vite ! Huit mois seulement, ni plus ni moins. Mais il n’y avait rien eu à faire, puisque tout ce qu’elle voyait dans les yeux de Ben, c’était plus que jamais ce merveilleux sentiment qu’était l’amour. Benjamin était un formidable jeune homme et il avait tout pour rendre une femme heureuse. Mais en ce qui la concernait, rien ne devait la détourner de son apostolat sur cette terre.
Gabrielle s’en était voulu, à ce moment-là. En effet, si dès le départ, elle lui avait parlé franchement de ce qu’elle pensait vraiment du mariage, de ce qu’elle attendait de la vie et, surtout, de ses grands projets humanitaires. Evidement, si elle lui avait dit tout cela, peut-être qu’ils n’en auraient pas été là !
Ben ignorait le merveilleux projet de son cœur, ce doux rêve si cher à son âme. Et il était loin de se douter que la personne qu’il voyait devant lui n’était pas une jeune fille tout à fait comme les autres, et qu’elle était vraiment loin de leur ressembler.
Curieusement, à chaque fois que Gabrielle avait pensé à cette séparation, elle avait ressenti un pincement au cœur, ce qui lui avait prouvé qu’elle n’était pas encore vraiment prête à accepter cette éventualité. Car, malgré tout, Benjamin provoquait un véritable trouble chez-elle. Et cette sensation avait commencé à semer le doute dans son esprit. Elle avait été vraiment perturbée, parce qu’elle s’était sentie submergée par des questions fondamentales : Était-elle vraiment la personne qu’elle pensait être ? Car elle ne se reconnaissait plus. Devait-elle s’abandonner dans les bras de Ben ? Était-ce une tentation ou une épreuve qui se dressait devant elle, afin de lui prouver que l’on n’était jamais sûr de rien ? Devait-elle passer par cet acte, pour savoir si elle était vraiment destinée à cette vie qu’elle souhaitait de tout son être ? Aussi s’était-elle dit : « Si c’est une tentation, je suis prête à y faire face. » Et elle avait voulu savoir jusqu’où elle pouvait aller avec Benjamin.
Alors, un soir qu’ils étaient revenus d’un dîner, Ben lui avait proposé de venir chez lui et, malgré une certaine appréhension, elle avait accepté son invitation. Elle avait été surprise de voir le sourire de satisfaction qu’avait affiché Benjamin. Curieusement, ce sourire l’avait un peu figée, néanmoins, elle avait suivi Ben.
En entrant chez Benjamin, Gabrielle n’avait pas été surprise, parce que l’appartement était à l’image de son propriétaire, il respirait le confort et le bien-être. Benjamin lui avait proposé de boire quelque chose, elle avait opté pour un thé. Elle s’était installée confortablement sur le canapé pour l’attendre. Ben était sorti de sa cuisine les bras chargés d’un plateau, sur lequel étaient posés deux tasses, une théière, du sucre et des rondelles de citron vert. Benjamin s’était installé à côté d’elle, ils avaient discuté quelques minutes. Son ami avait arrêté de lui parler, mais il avait continué de la fixer, ses yeux débordaient d’amour. Il s’était penché alors sur elle pour l’embrasser tendrement, Gabrielle s’était laissée faire. Ils s’étaient embrassés encore et encore, puis Benjamin l’avait tout doucement soulevée pour l’emporter jusqu’à son lit. Elle avait apprécié ses baisers, elle en redemandait encore et encore, mais, lorsqu’elle s’était sentie complètement allongée sur le lit, elle s’était brusquement braquée.
Gabrielle s’était raidie, c’était comme si elle était sortie d’un rêve. En effet, la braise, le feu que Benjamin avait allumés en elle, s’était éteints comme par magie. Gabrielle n’avait plus été la même et Benjamin s’en était rendu compte, parce que, dans les yeux de son amie, il n’avait plus vu que de la pitié. Ce cher Ben avait été déstabilisé par ce revirement de situation. Aussi, il lui avait proposé de la raccompagner chez elle. Il n’avait rien dit tout le long du voyage et, en arrivant près de chez Gabrielle, il s’était contenté de lui dire bonsoir et il avait regagné sa voiture sans se retourner.
Ce soir-là, Gabrielle s’était endormie calmement, sereine et apaisée. Mais, au petit matin, elle s’était réveillée en sursaut car, durant la nuit, elle avait fait un curieux rêve. Et dans ce rêve, elle avait vu Ben qui se mariait avec une jeune fille, mais elle n’avait pas vu le visage de la femme. Ce dont elle était sûre, c’était que ce n’était pas elle. Cependant, la chose la plus importante qu’elle ait retenue de ce rêve, c’était le visage rayonnant de Ben. Il avait l’air tellement heureux ! Et ce sourire radieux qu’il adressait à sa jeune épouse l’avait réveillée dans son sommeil.
Ce rêve avait profondément ému Gabrielle, alors elle était restée allongée pour y réfléchir. Après avoir bien médité sur tout ça, elle avait quitté son lit pour se diriger vers la salle de bains. En sortant de sa douche, elle s’était mise à prier, comme à son habitude. Gabrielle avait été fière d’elle, car sa douce voix intérieure lui avait fait définitivement entendre raison. En effet, son esprit embrouillé s’était éclairci. À partir de ce moment, tout avait été clair dans sa tête. Soulagée, elle s’était installée pour prendre son petit déjeuner.
Gabrielle s’était sentie coupable et mal à l’aise, car elle avait été persuadée d’avoir agi comme une égoïste. Elle avait remarqué cet amour naissant dans les yeux de Ben, mais elle n’avait pas eu le courage de lui parler franchement. Elle l’avait vu succomber mais, à cause de son manque de maturité, elle n’avait pas trouvé nécessaire d’exposer à son ami la vision qu’elle se faisait de la vie. Alors, naïvement, elle avait continué à le fréquenter, comme si de rien n’était. Certes, elle s’était sentie attirée par lui et avait tenu tellement à garder son amitié, qu’elle avait totalement oublié les risques et les conséquences que cela pouvait engendrer. Pourtant, avisée comme elle l’était, elle savait pertinemment que, dans toutes les situations ambiguës, il y avait une limite à ne pas dépasser. Car les conséquences pouvaient être quelques fois désastreuses. Mais elle avait voulu savoir si elle n’était vraiment pas faite pour vivre une vie de couple avec lui. À partir de ce moment, elle avait été sûre de ce qu’elle voulait et elle n’avait plus eu aucun doute sur la voie qu’elle voulait suivre. Gabrielle s’était sentie puérile malgré tout, car elle avait été trop légère et blasée avec lui. Il était temps d’ouvrir son cœur à Benjamin, qu’il pût enfin découvrir sa véritable personnalité. Ainsi, Ben connaîtrait toutes ces choses extraordinaires et merveilleuses qu’elle nourrissait au plus profond de son être depuis son jeune âge.
En effet, depuis ce songe extraordinaire qu’elle avait fait la nuit qui avait suivi le jour où elle avait fêté ses dix ans, ce rêve magique l’avait changée mystérieusement, il l’avait transformée, elle était devenue une autre personne. Tout cela avait complètement modifié sa jeunesse, sa façon d’être, son raisonnement, oui ! elle était devenue une autre Gabrielle.
Depuis cette rencontre, cette nuit chargée d’émotion, plus jamais les choses n’avaient eu la même importance à ses yeux. Certes, son entourage avait remarqué sa transformation, mais personne n’avait osé mettre en doute sa parole ou ses convictions. Car nul ne voulait la froisser en lui adressant une seule pensée négative.

En ce temps-là, alors qu’elle n’était encore qu’une petite fille, elle ressentait déjà au plus profond de son être un ardent désir de devenir une personne de cœur, avec toutes ses qualités !
Toute sa vie elle se souviendrait de cette nuit chargée d’émotion. Et ce rêve était à jamais gravé dans son esprit.
Voici comment cela s’était passé :
Cela faisait déjà deux bonnes heures qu’elle s’était couchée, mais elle n’arrivait pas à s’endormir. En effet, durant la journée, elle avait eu une belle fête d’anniversaire et elle revivait encore tout cela dans sa tête. Elle avait ressenti tellement d’émotion au moment où elle soufflait ses dix bougies, que des larmes lui étaient montées aux yeux.
Alors, son esprit vagabondait, elle regardait le plafond en attendant que le sommeil veuille bien s’emparer d’elle. Évidemment, elle avait fini par s’endormir sans s’en rendre compte. C’était alors qu’elle s’était vue marcher dans la campagne par une belle matinée ensoleillée.
Heureuse et enjouée, la journée avait très bien commencé pour elle, la température commençait à monter. Elle avait regardé sa montre, il était neuf heures. Elle allait retrouver Béa, pour continuer le chemin ensemble jusqu’à l’école. Elle aimait particulièrement prendre cette route à travers champs. Ainsi, elle pouvait contempler les fleurs sauvages qui jonchaient la prairie, ces jolis coquelicots qui se berçaient au gré du vent. De loin, elle pouvait admirer ces grands chênes et ces peupliers majestueux qui semblaient monter jusqu’au ciel. Tout cela lui donnait l’impression que les éléments chantaient à l’unisson, que le vent soufflait le même air que les oiseaux. Respirant cette nature verdoyante et florissante, elle avançait tranquillement vers la maison de son amie.
La demeure de Béa se situait à six cent mètres de chez sa mamie. Le cœur léger, chemin faisant, elle avançait vers son amie d’un pas assuré. Lorsque soudain, elle avait cru apercevoir comme une ombre à deux cent mètres. Elle avait continué d’avancer sans aucune inquiétude. Curieusement, plus elle avançait, plus elle s’était sentie légère. C’était alors qu’une sensation de bien-être et de volupté était venue l’envahir. Un doux et mystérieux parfum était venu embaumer l’air, elle s’était empressée de humer cette senteur, ce qui l’avait enivrée de bonheur. Lorsque, brusquement, elle s’était retrouvée devant une femme mystérieuse qui lui avait semblé sortir de nulle part. Elle semblait irréelle, pourtant, cette dame était bien là, devant elle. Un rayonnement éblouissant émanait de sa personne, ce qui avait empêché Gabrielle de voir distinctement son visage.
La dame avait salué Gabrielle, puis elle s’était mise à lui parler. Mais, ce qui avait tout de suite étonné Gabrielle, c’était que cette personne l’avait appelée par son prénom.
D’où la connaissait-elle ?
Gabrielle avait été intriguée mais, cependant, elle n’avait pas été du tout effrayée, puisqu’elle s’était sentie vraiment bien et qu’aucune appréhension n’était venue troubler sa sérénité non plus. Et, tout euphorique, elle lui avait demandé :
– Que voulez-vous exactement ?
Et c’était ainsi que la dame lui avait annoncé toutes ces choses merveilleuses et fantastiques :
– Bonjour, petite Gabrielle ! Sais-tu que tu fais partie de celles et de ceux qui seront toujours des justes ici-bas ? Cet intérêt, cette curiosité, ce formidable désir et ce besoin que tu as eu de connaître le Créateur et son Verbe, cela ne t’est pas venu en vain. Aujourd’hui, tu es en âge de savoir qui tu es réellement. As-tu remarqué comme ton cœur est bon et généreux, et cette intelligence exceptionnelle dont tu es dotée ? Tout cela est pour toi une grâce, une bénédiction. Car une vie formidable et extraordinaire t’est destinée, mais ce n’est pas pour tout de suite. Ton guide spirituel sera toujours à tes côtés pour t’aider à ne pas trébucher, afin que tu prennes toujours la bonne direction. Aujourd’hui, te voilà avisée, alors reste toujours aussi sage, ma douce Gabrielle, et tu verras !
Puis cette personne avait disparu comme elle était apparue, sans que Gabrielle ait eu le temps de lui répondre. Alors, sans réfléchir, elle avait continué son chemin, elle s’était retournée tout de même, pour vérifier s’il y avait quelqu’un derrière elle, mais il n’y avait plus personne.
Avait-elle rêvé ? Était-elle devenue folle ? Ou avait-elle vraiment vu et parlé à une personne, et à qui ?
Machinalement, Gabrielle avait regardé sa montre, qui marquait toujours la même heure : neuf heures. Tout naturellement, elle avait retrouvé le sourire et l’insouciance d’une petite fille de son âge. Elle avait plissé tout de même son joli front avec un petit air interrogateur, puis elle avait continué son chemin pour retrouver Béa. Elle ne pouvait s’empêcher de songer à ce qui venait de lui arriver, c’était tellement extraordinaire ! Lorsqu’elle s’était retrouvée enfin face à son amie, celle-ci l’avait fixée bizarrement en lui demandant : « Qu’est ce qui se passe, pourquoi es-tu si heureuse ? » En effet, il semblait à Béa que quelque chose avait complètement transformé son amie Gabrielle.
Elle s’était tellement agitée, dans son rêve, que de grosses gouttes de sueur perlaient sur son visage et tout cela avait fini par la réveiller. Curieusement, elle s’était rendormie jusqu’au matin. Mais, en sortant de sa chambre, ce matin-là, Gabrielle avait été dans tous ses états, car elle était sûre d’avoir vu un ange.
Lorsqu’elle avait raconté son rêve à sa mamie, Gabrielle avait été vraiment heureuse, parce que Yaya lui avait dit tout simplement, en la serrant très fort dans ses bras : « Tu as de la chance, ma chérie. » Et les paroles de sa mamie l’avaient confortée dans sa joie et sa détermination, car elle ne voulait surtout pas entendre quelqu’un lui dire qu’elle avait rêvé. C’était qu’elle avait vécu cet instant avec tellement de réalisme, qu’aucune personne n’avait le droit de venir lui dire un jour que tout cela n’avait été qu’un simple rêve. Non, personne n’avait le droit de venir lui enlever ce sentiment de vérité et de joie intense qu’elle avait désormais en elle. Ainsi, pour elle, tout était vrai, elle avait réellement rencontré en songe un être divin.
Tout ce que lui avait dit sa grand-mère ne l’avait pas surprise, parce qu’elle savait que Yaya priait beaucoup, d’ailleurs, elle l’avait surprise des centaines de fois en train de prier. Cependant, à cause de son père, qui ne voulait pas entendre parler de religion, Yaya ne l’avait jamais invitée à venir prier avec elle. Pourtant, incontestablement, c’était là l’un des désirs le plus cher de son aïeule. Mais, pour la paix et la tranquillité du ménage de sa fille, Yaya avait préféré laisser faire le Seigneur. Elle avait eu raison car, un jour, sa petite Gabrielle avait décidé toute seule de partir à la recherche de la vérité. Et son amie Béa avait énormément contribué à son engagement dans cette voie !
C’était ainsi, qu’auprès des siens, Gabrielle avait vécu en toute insouciance sa vie de jeune fille, avec ses convictions, dans une parfaite harmonie.

Mais, par une triste journée d’automne, elle était dans sa seizième année et Clothilde dans sa dix-septième, alors qu’elles étaient chez Yaya et papi Jo, le téléphone s’était mis à sonner. Jamais Gabrielle n’oublierait ce jour-là : À peine avait-elle entendu la sonnerie du téléphone, que son cœur s’était mis à battre la chamade. Et aussi incroyable que cela avait pu lui paraître, elle avait su que quelque chose de grave venait d’arriver, qu’un grand malheur venait de toucher la famille. Et effectivement, c’était quelqu’un de l’hôpital où on venait de transporter ses parents, après le grave accident de la route qui venait de leur coûter la vie.
Gabrielle et Clothilde avaient tenu à accompagner leurs grands-parents à l’hôpital. Mais, arrivées dans ce triste lieu où on les avait conduites ensuite vers les dépouilles de leurs parents bien aimés, Gabrielle s’était sentie tellement désemparée, qu’elle avait préféré rester là, à attendre sur un banc dans le couloir. Elle était tellement malheureuse ! Elle était ivre de douleur et de chagrin !
Cela ne faisait même pas deux minutes que Gabrielle s’était installée sur ce banc, lorsqu’elle avait ressenti une présence. C’était comme si quelqu’un l’observait. Elle avait regardé autour d’elle, elle n’avait rien remarqué de spécial. Cependant, un doux et mystérieux parfum embaumait l’air, elle avait humé cette douce senteur et, à l’instant même, une sensation de bien-être était venue l’envahir. Alors, elle avait reconnu cet arôme citronné, ce merveilleux parfum de paradis qui jadis avait imprégné ses narines, alors qu’elle n’était encore qu’une petite fille.
Elle avait levé les yeux et son regard s’était posé sur cette femme, désormais assise sur le banc juste en face d’elle. Cette personne lui semblait très étrange, elle était vêtue d’un vêtement d’une incroyable blancheur, un joli voile de la même texture et de la même couleur couvrait ses cheveux, ce qui faisait ressortir extraordinairement son teint d’ébène. Quelque chose de lumineux émanait de son doux visage.
Cette femme était tellement sereine et apaisante, qu’en la regardant fixement, Gabrielle avait ressenti une main se poser sur son épaule et, à cet instant, une douce chaleur vivifiante était venue réchauffer son cœur meurtri. Et, tout à coup, elle avait entendu cette femme qui était assise là, à l’observer avec son doux sourire, lui adresser ces merveilleuses paroles, d’une voix qui était comme un enchantement à ses oreilles :
– Laisse faire le temps, Gabrielle, car la paix est avec toi. Sache que tu n’es pas seule et que tu ne l’as jamais été. L’amour et la force ont toujours été là pour te guider. Plus tu vieilliras, Gabrielle, et plus tu ressentiras cette formidable félicité. Et, avec le temps, ma petite Gabrielle, tu comprendras et tu apprécieras le sens de mes paroles ! Garde toujours confiance et, quoi qu’il arrive, n’abandonne jamais. Car, plus on cultive sa foi, plus on ressent cette extraordinaire force qui pousse l’homme toujours vers l’avant, malgré tous les obstacles de la vie. Surtout, Gabrielle, ne te pose jamais de questions, parce que chacun a sa destinée.
Durant la vie de l’homme, bonheur ou malheur, quel que soit ce qui l’atteint, il doit se dire que c’est son lot. Bien qu’il n’ait rien demandé pour autant, inexorablement, ce sera sa condition. Car la nature à une loi et tous doivent suivre les règles, que l’on soit bon ou méchant. Néanmoins, il y a une chose particulière que tu dois savoir et que tu dois retenir tout au long de ta vie : C’est qu’ici-bas, il n’y a ni hasard, ni coïncidence !
Aussi, Gabrielle, sache que cette chose indéfinissable que tu ressens aujourd’hui n’est en rien comparable à ce que tu vivras plus tard. Alors, garde confiance et espérance, reste telle que tu es, garde ton cœur généreux, suis la voie qui t’est tracée et, assurément, tu connaîtras la béatitude. Maintenant, sois en paix, Gabrielle !

Brusquement, Gabrielle avait entendu la voix de sa grand-mère qui l’appelait. Yaya était complètement affolée, car elle s’adressait à Gabrielle et celle-ci était là, prostrée, à regarder fixement vers ce banc vide. Lorsqu’elle s’était enfin tournée vers sa grand-mère, Gabrielle avait un sourire aux lèvres. Mais le terrible chagrin qu’elle avait remarqué dans les doux yeux de Yaya l’avait brusquement fait reprendre contact avec la réalité. Furtivement, elle avait jeté un dernier regard vers le banc, celui-ci était désormais vide. Mais le doux parfum embaumait encore le couloir, ce qui l’avait persuadé que cette personne était encore présente à ses côtés. Néanmoins, son chagrin était tellement pénible, qu’elle s’était laissée aller à pleurer dans les bras de sa grand-mère. Ses grands-parents, si généreux, si bons avec elle et Clothilde ! Elles étaient encore si jeunes ! S’ils n’avaient pas été là, que seraient-elles devenues, toutes les deux ?

Depuis ce jour et cette rencontre à l’hôpital, plus jamais Gabrielle ne s’était lamentée sur son sort. Du plus profond de son être, elle savait que le destin de ses parents et le sien étaient liés à jamais. Aujourd’hui, ils étaient rayés du grand livre de la vie, néanmoins, leurs âmes avaient retrouvé leur plénitude.
À chaque fois que Gabrielle pensait à tout cela, son esprit allait aussitôt vers son amie Béa, celle qui avait été le trait d’union entre la providence et elle. En effet, sans le savoir, son amie avait contribué à l’évolution de sa formidable vie. Malheureusement, Béa n’était plus de ce monde, elle non plus.

Elles étaient encore très jeunes, Béa et elle avaient tout juste neuf ans. C’était au moment où son amie suivait ses cours de catéchisme. À chaque fois que son amie Béa revenait de ses cours, c’était avec fascination que Gabrielle écoutait tout ce qu’elle lui racontait de ce qu’elle avait appris sur la vie du Christ.
Gabrielle, qui était de plus en plus fascinée par ce récit extraordinaire et fantastique, avait voulu absolument en savoir plus. Alors, son seul désir avait été de pouvoir suivre, elle aussi, des cours de catéchisme avec son amie. Mais un obstacle s’était présenté à elle, c’était la réticence de ses parents vis-à-vis des religions. Et, de se fait, elle avait été persuadée qu’en leur demandant leur permission, elle aurait entendu un non catégorique. Mais, curieusement et à sa grande surprise, ses parents avaient accepté sans aucune hésitation. Elle avait été tellement heureuse, qu’elle en était restée tout simplement sans voix. Gabrielle avait mis tout son amour en cette vérité car, en apprenant toutes ces choses, elle avait trouvé sa raison de vivre, sa source d’énergie, c’était ce qui lui faisait défaut pour bien orienter sa vie.
Elle avait véritablement trouvé sa voie. Aussi, sa foi ne pouvait que s’accroître d’avantage, parce que, lorsqu’on cherchait la vérité avec obstination, à coup sûr, on recevait une réponse positive et, chez elle, ça avait toujours été une certitude.
Si jeune et déjà très forte dans sa foi et sa détermination ! Gabrielle ressentait plus que jamais une présence à ses côtés et cet amour infini qui animait son cœur la rassurait inlassablement.
Par contre, pour sa chère Clothilde, le destin avait été bien différent. Elle n’avait pas ressenti le besoin de connaître autre chose que ce qu’elle voyait et pouvait toucher. En réalité, Clothilde n’avait jamais trouvé un intérêt quelconque à la religion, pas le moindre désir.
Clothilde était une jeune fille gentille, attentionnée et, surtout, elle n’éprouvait aucun ressentiment vis-à-vis des gens. Elle avait toujours été une personne douce, discrète, mais parfois un peu trop influençable. Quelques fois, une mystérieuse tristesse assombrissait son doux visage. Mis à part cela, elle était comme la plupart des jeunes de son âge, ne pensant qu’à croquer la vie à pleines dents, sans aucune contrainte. Et la religion était vraiment le cadet de ses soucis.
Pauvre Clothilde ! Elle était morte ignorante, sans avoir connu cette merveilleuse sensation, cette sérénité, cette paix intérieure qu’elle-même ressentait. Clothilde était partie regrettablement, comme elle avait vécu sur cette terre, sans aucune pensée pour le Créateur. Mais c’était son choix et Gabrielle avait toujours respecté la façon de vivre de sa sœur aînée.
Elle savait que nul n’était forcé de croire en un être suprême ou divin et que le libre arbitre était donné à chacun. Car c’était cela la formidable force et la condescendance infinie du Créateur !
Néanmoins! Dieu et son Verbe (la sagesse) à sa droite observent l’humanité !

Christ nous dit :
« En vérité, en vérité, je vous le dis : avant qu’Abraham ne fût, je suis »(Jean, 8-58)

« Oui, ma bouche profère la vérité
Et mes lèvres ont l’iniquité en horreur.
Toutes les paroles de ma bouche sont justes :
Il n’y a en elles rien de faux ni de tortueux.
Toutes sont exactes, pour celui qui est intelligent,
Et droites, pour ceux qui ont trouvé la science.
Recevez mon instruction et non l’argent,
La science plutôt que l’or pur.
Car la sagesse vaut mieux que les perles
Et il n’est pas de joyau qui lui soit comparable.
Moi, la sagesse, j’habite avec la prudence,
Et je possède la science de la réflexion.
La crainte de Dieu, c’est la haine du mal,
L’orgueil et l’arrogance, la voie du mal ;
Je hais la bouche perverse.
C’est à moi qu’appartiennent le conseil et l’entendement ;
Je suis l’intelligence ; la force est en moi.
J’aime ceux qui m’aiment
Et ceux qui me cherchent avec empressement me trouvent.
Avec moi sont les richesses et la gloire,
Les biens durables et la justice.
Mon fruit vaut mieux que l’or pur
Et ce qui vient de moi est mieux que l’argent éprouvé.
Je marche dans le chemin de la justice,
Au milieu des sentiers du droit,
Pour donner des biens à ceux qui m’aiment,
Et combler leurs trésors.
Dieu m’a donné d’être prémisse de ses voies,
Prélude de ses œuvres, depuis toujours.
Dès l’éternité, j’ai reçu l’investiture,
Dès le commencement, avant les origines de la terre.
Alors qu’il n’y avait point d’abîmes, je fus enfantée,
Quand il n’y avait point de sources chargées d’eaux.
Avant que les montagnes fussent immergées,
Avant les collines, j’étais enfantée,
Lorsqu’il n’avait encore fait ni la terre ni les campagnes,
Ni les premiers éléments de la poussière du monde.
Lorsqu’il disposa les cieux, j’étais là.
Lorsqu’il traça un cercle à la surface de l’abîme,
Lorsqu’il affermit les nuages en haut,
Et qu’il dompta les sources de l’abîme,
Lorsqu’il fixa sa limite à la mer,
Pour que les eaux n’en franchissent pas le bord,
Lorsqu’il posa les fondements de la terre,
J’étais à ses côtés comme son architecte,
Me réjouissant chaque jour,
Jouant sans cesse en sa présence. »
(Prov. 8-7,30)


Dans sa clairvoyance, Gabrielle pense sans cesse à cette formidable flamme dont tout être humain fût doté dès sa conception. Pour beaucoup, ce guide spirituel s’est mis en veille et, malheureusement, à la moindre faiblesse de l’esprit, cette flamme peut s’éteindre. Pourtant, il est tellement facile de la raviver, mais pour cela il suffit tout simplement de faire une bonne action. Redevenir quelqu’un de bon et généreux. S’adresser directement et sans honte ni préjugé à Celui-que-l’on-appelle-lorsque-tout-va-très-mal, que l’on croie ou non en son amour et en son existence. Néanmoins, si cet appel vient d’un cœur sincère, cela suffit pour ressentir petit à petit son âme s’embraser d’allégresse, parce qu’elle a retrouvé toute sa plénitude, celle qu’elle connu jadis, au moment de sa conception : l’Amour !
C’était exactement ce que Gabrielle souhaitait pour sa douce Clothilde. Malheureusement, celle-ci avait décidé un jour, qu’elle en avait assez de la vie. Ainsi, elle aussi était partie sans avoir eu le temps de ranimer sa petite flamme.
Lorsque Gabrielle pensait encore à sa sœur, son autre, son rayon de soleil, elle ne pouvait que prier pour le repos de son âme, car elle avait commis un acte abominable. Clothilde serait à jamais dans son cœur. Aujourd’hui encore, elle n’arrivait toujours pas à comprendre son geste. Comment avait-elle pu commettre l’irréparable ?

Gabrielle se souvenait comme elles avaient été heureuses au début de ce séjour qu’elles avaient décidé de passer toutes les deux en Tunisie.
Clothilde était une jolie jeune fille, généreuse mais trop sensible. Elle avait tout pour réussir sa vie, la beauté et l’élégance, dont elle avait hérité de sa regrettée et douce mère. Avec ses cheveux blonds et ses grands yeux verts, elle faisait penser à un grand champ de blé. Lorsqu’elle souriait, instantanément, deux jolies fossettes venaient creuser ses joues pleines de fraîcheur et de magnifiques dents blanches, bien alignées, évoquaient le sillon du laboureur. Gabrielle et Clothilde, toutes les deux, faisaient le bonheur et la joie de leurs grands-parents. Yaya et papi Jo, l’un comme l’autre, aimaient bien les appeler : « mes jolies fleurs des champs ». Pour Clothilde et Gabrielle, leurs grands-parents étaient leur pierre angulaire. Yaya et papi Jo les avaient pratiquement élevées, alors, tout naturellement, ils avaient pris une très grande place dans leurs cœurs. Elles étaient complémentaires, elles avaient une grande complicité et se confiaient tout. Elles étaient vraiment soudées. La disparition de leurs parents, survenue alors qu’elles étaient encore des jeunes filles, avait évidemment contribué à cette grande complicité. Elles étaient restées inséparables, jusqu’au départ de Clothilde pour l’université. Entre elles existait vraiment une entente parfaite. Clothilde, attentionnée comme elle l’était, avait toujours protégé sa petite sœur. Gabrielle chérissait tout autant sa sœur aînée.
Le geste de Clothilde avait terriblement bouleversé Gabrielle, elle avait ressenti une très grande douleur, c’était comme si son cœur s’était mis à saigner de peine et de chagrin. Pauvre Clothilde ! Il y avait maintenant plus de vingt-cinq ans que tout cela s’était passé. Gabrielle se rappelait encore de ce jour, qui était resté présent dans son esprit.

Elle revoyait Clothilde toute souriante, le jour où elle s’était installée à l’université. Comme elle était joyeuse à l’idée de se faire de nouveaux amis et, surtout, de se trouver un petit fiancé ! Ce qui, bien sûr, n’avait pas tardé à arriver, puisque, deux mois après son installation, elle avait fait la connaissance de Romuald, un grand jeune homme aimable et bien élevé, qui entamait sa troisième année de psychologie. Clothilde, qui débutait sa première année, était enthousiaste, puisque tous les deux souhaitaient embrasser cette carrière.
Quelques mois après leur rencontre, très amoureux, ils avaient projeté de se marier à la fin de la formation de Romuald. Leur réussite professionnelle était la chose la plus importante. Ils formaient un très beau couple, ils s’aimaient et tout était parfait pour eux. Oui, ils étaient heureux. Cependant, en faisant la connaissance de son cher Romuald, Clothilde avait aussi fait la connaissance de celle qui allait faire basculer sa vie à jamais. Romuald était toujours accompagné de son amie d’enfance, Inès. Ils étaient inséparables. Cette Inès était de toutes les parties et, c’était tout naturellement, que Romuald l’avait présentée à Clothilde. Gabrielle n’avait rien contre cette jeune fille, mais le jour où elle avait fait sa connaissance, elle avait tout de suite ressenti qu’elle dégageait des ondes négatives. Quand, pour la première fois, Inès s’était mise à parler en sa présence, elle avait ressenti l’intonation fausse de sa voix. Quant à ses conversations téléphoniques, les propos qu’elle tenait n’avaient rien d’amical et encore moins de sincère. Vraiment, cette fille n’avait rien d’intéressant à apprendre ou à apporter à qui que ce fût. Gabrielle avait su immédiatement que cette Inès ne serait jamais une amie sur qui sa sœur pourrait compter. Mais Clothilde, émerveillée par les talents perfides d’Inès, n’avait pas vu sa fourberie et elle aimait raconter avec humour ses dernières frasques à Gabrielle, ce qui, bien évidemment, venait confirmer les doutes et la conviction que Gabrielle avait déjà sur cette fille.

Dans la vie, on est appelé à rencontrer toutes sortes d’individus, mais ces personnes mal intentionnées portent en elles ces terribles vices que sont la jalousie et la perfidie. Or, Clothilde n’était pas armée contre cette nature humaine, elle qui était conciliante ne relevait jamais les mesquineries. Elle n’était pas une personne négative, elle ne voyait pas le mal, lorsqu’on était méchant avec elle, elle préférait garder le silence, elle savait gérer la mauvaise foi de certaines personnes avec beaucoup de quiétude. Il n’y avait pas à dire, cette chère Clothilde était d’une bonne nature, elle était douce et sensible ; en vérité, Clothilde ne connaissait pas la haine.
Aussi, Gabrielle s’était bien gardée de dire du mal d’Inès à sa sœur, puisqu’elle était devenue sa meilleure amie et que, qui plus est, c’était l’amie d’enfance de son fiancé. Tout cela avait été extrêmement pénible pour elle, car Gabrielle avait su que le combat était perdu d’avance. Connaissant sa sœur, si sensible et fidèle en amitié, il lui avait semblé mieux valoir laisser faire le temps.
En observant bien cette jeune fille, Gabrielle avait acquis une certitude : Cette Inès était et avait toujours été amoureuse de Romuald. Mais elle n’avait jamais eu le courage d’avouer son amour à son ami de toujours. Elle jouait la comédie depuis des années à Romuald, ainsi qu’à Clothilde. Mais la triste réalité, c’était qu’elle était jalouse de Clothilde, car, du jour où elle avait fait sa connaissance, elle l’avait détestée irrémédiablement. Et Clothilde, qui ne se doutait de rien, avait laissé cette intrigante s’immiscer en toute tranquillité dans leur couple dès que l’occasion s’en était présentée. Et Inès, étant très douée pour la comédie, avait su jouer la confidente, l’amie bonne conseillère, pour amadouer sa rivale. Avec ses bonnes intentions, elle avait aveuglé Clothilde. Pauvre Clothilde ! Elle avait été à la merci de cette personne, qui était en service commandé. Et Gabrielle, qui savait que sa sœur n’avait aucune arme pour se défendre, n’avait rien vu de positif dans cette amitié.
Tout cela avait désespéré Gabrielle, d’autant plus qu’à chaque fois qu’elle avait eu sa sœur au téléphone, c’était toujours pour l’entendre parler d’Inès. Il n’y avait plus eu que ce nom dans sa bouche. Gabrielle s’était sentie tellement impuissante ! Elle n’avait plus eu qu’une chose à faire, s’en remettre à Dieu. Se mettre à prier en souhaitant que sa sœur entrevoie le double jeu de cette jeune fille. Mais, jusque-là, Clothilde n’avait rien vu d’autre en cette sournoise qu’une amie sincère. Et toute cette hypocrisie avait duré deux longues années. Gabrielle était convaincue d’une chose : si sa sœur aînée avait eu dans sa vie ne serait-ce qu’une petite pensée pour le Créateur, à coup sûr, elle aurait découvert le vrai visage d’Inès. Tout cela était bien dommage ! Quel gâchis !

Ce tragique été de l’année 1973, Clothilde avait promis à Gabrielle qu’elles partiraient toutes les deux en voyage pour les vacances. Elles avaient enfin choisi leur destination : la Tunisie. Le mois d’août serait parfait pour passer ensemble ces dix jours. Elles étaient très excitées en y pensant. Le jour tant attendu était arrivé enfin. C’était un 15 août, l’avion devait décoller à dix heures. Clothilde se trouvait chez Gabrielle depuis la veille et elles avaient passé la journée à faire leurs derniers achats. Puis, les valises presque bouclées, elles s’étaient couchées tôt, parce qu’elles voulaient être en forme après le voyage, pour profiter pleinement de leurs vacances.
Le plus important pour elles, c’était qu’elles allaient retrouver leur complicité. C’était, de loin, ce qui leur faisait le plus plaisir, car lorsqu’elles étaient ensemble, elles aimaient se raconter des bêtises pour rire et rire encore ! Elles débordaient de fraîcheur et d’insouciance !
Elles étaient arrivées très tôt à l’aéroport et, après l’enregistrement de leurs bagages, elles avaient été les premières à monter dans l’avion. Dès le décollage de l’appareil, elles avaient eu tellement de choses à se raconter qu’elles n’avaient pas vu le temps passer.
À leur arrivée à Djerba, cette magnifique île paradisiaque, elles avaient reçu un accueil très chaleureux. Il faisait un temps magnifique, le paysage était remarquable. Dès leur sortie de l’aéroport, malgré une chaleur étouffante, une douce brise était venue furtivement leur amener d’enivrants parfums orientaux.
De l’aéroport à l’hôtel, il n’y en avait que pour trente minutes. Elles avaient pris tout de suite un taxi en direction de leur hôtel. Tout au long du parcours, elles avaient été subjuguées par cet environnement exceptionnel : la végétation luxuriante, de magnifiques palmiers verdoyants qui donnaient à la nature un aspect paradisiaque. C’était un régal pour les yeux ! Elles avaient été véritablement enchantées par ce pays à l’étonnante architecture blanche.
Fortes de leur jeunesse et de leur joie de vivre, elles avaient été persuadées d’être arrivées dans un petit coin de paradis. Mais elles n’avaient pas été au bout de leurs surprises ! En arrivant à l’hôtel, tout avait été exactement comme elles l’avaient imaginé. Leur bonheur avait été complet, tout leur souriait, ce qui les avait rendu encore plus rayonnantes et débordantes de joie de vivre. En effet, ce décor était digne des contes des Mille et Une Nuits. Tout cela leur promettait un merveilleux séjour touristique.
Clothilde était heureuse, mais une petite ombre était venue malgré tout gâcher son séjour. Romuald lui manquait déjà terriblement. Elle s’était efforcée de paraître heureuse, parce qu’elle était tout de même contente d’être avec sa petite sœur.
Tout s’était très bien passé, jusqu’au septième jour de vacances. Cela faisait deux jours que Clothilde essayait de joindre Romuald au téléphone. Elle était inquiète et elle ne trouvait aucune explication à son silence. Gabrielle avait tout essayé pour la réconforter, parce qu’elle ne voulait surtout pas qu’elle s’imaginât n’importe quoi.
Gabrielle, connaissant sa sœur déjà si sensible, avait commencé à s’inquiéter malgré elle, d’autant plus qu’elle n’avait pas trouvé de mots pour la réconforter. Elle avait bien essayé de trouver tous les prétextes pour apaiser son anxiété, rien n’y avait fait. Clothilde s’était mise dans un tel état, qu’elle n’avait plus trouvé de goût à rien.
Pourtant, en ce qui concernait ce jeune homme, Gabrielle n’avait aucun doute, elle avait essayé tant bien que mal de le faire comprendre à sa sœur. Elle l’avait suppliée de croire en son fiancé et de lui accorder un peu de temps. Elle était persuadée qu’il se passait quelque chose de grave dans la famille de Romuald, que ce ne pouvait être qu’une affaire de ce genre et qu’il n’avait pas trouvé un moment à lui pour l’appeler. Inès était probablement au courant de quelque chose…
Au fond d’elle-même, Clothilde savait que son fiancé était un garçon sérieux qui connaissait très bien sa façon de penser. Alors, ce n’était pas à Inès de lui donner des nouvelles de Romuald.
Le doute et la jalousie s’étaient emparés de son esprit et Gabrielle l’avait remarqué. Sa sœur n’était déjà plus la même personne et cette mystérieuse mélancolie qui venait quelques fois assombrir son doux visage était plus que jamais présente dans son regard. Gabrielle avait tout essayé pour lui remonter le moral, mais Clothilde n’était plus arrivée à retrouver sa raison. Gabrielle regardait sa sœur, elle était lointaine et son visage était déformé par la jalousie et une haine pitoyables. Gabrielle avait été désemparée, avait prié, ne souhaitant qu’une seule chose : entendre la sonnerie du téléphone et que Romuald fût au bout du fil. Elle était persuadée que tôt ou tard il aurait fini par appeler Clothilde et que tout serait rentré dans l’ordre.
Toute cette histoire était venue gâcher leurs vacances, qui avaient pourtant si bien commencé. Et elle qui ne se posait jamais de questions avait, durant cette période, un peu perdu pied, car elle n’avait plus su quoi faire pour consoler sa sœur. Alors, elle s’était tout simplement mise à prier. Elle avait vu sa sœur en train de perdre la tête. Une névrose s’était emparée de Clothilde, elle n’était vraiment plus la même. Gabrielle, impuissante, avait senti la situation lui échapper, sa sœur ne l’écoutait plus. Clothilde avait fini par décréter qu’elle ne voulait plus entendre parler de Romuald. Elle avait décidé que c’était fini et tout ce qu’elle souhaitait dorénavant, c’était dormir. Elle avait fini par promettre à Gabrielle, qu’en se reposant pendant quelques heures, elle retrouverait tout son calme.
Cet après-midi-là, il y avait une excursion prévue. Gabrielle, qui souhaitait pourtant ardemment que Clothilde vînt avec elle, avait fini par accepter de la laisser dormir, puisque c’était son désir. Et Gabrielle ne désirant rien d’autre que le bien-être de sa sœur, avait été persuadée qu’un vrai repos lui serait effectivement très bénéfique.
Gabrielle avait pressenti quelque chose. Elle avait vu Clothilde sombrer dans un mutisme complet, ce qui l’avait attristée et l’avait rendue encore plus inquiète. Malgré tout, elle était partie à cette excursion, remplie d’un mauvais pressentiment. Clothilde souhaitant rester seule, Gabrielle avait respecté son choix.
Elle avait à peine quitté la chambre, que Clothilde avait attrapé le combiné du téléphone. Elle voulait téléphoner à Inès. Elle s’était finalement persuadée que seule son amie pouvait lui donner des nouvelles de Romuald. Elle voulait savoir ce qui n’allait pas, il lui fallait absolument éclaircir cette situation et Inès était la seule solution.
Pauvre Clothilde ! Elle avait eu sa prétendue amie au téléphone. Avec beaucoup de chaleur dans la voix, celle-ci était arrivée à réchauffer le cœur de Clothilde, lui disant combien elle était heureuse de l’entendre. Clothilde, réconfortée, avait tout de suite abordé le sujet de sa préoccupation, en lui demandant naturellement et sans tarder des nouvelles de Romuald. Bien qu’Inès ait su pertinemment où était Romuald, elle s’était fait un réel plaisir de lui répondre :
– Je n’ai aucune nouvelle de lui depuis deux jours. Mais je pense que tout va très bien pour lui ! Enfin… je suis gênée de te dire que… Romuald s’est marié hier avec une ancienne amie commune ! Je pense qu’elle est enceinte ! Tu peux me croire, Clothilde, j’ai été très choquée par son comportement ! Comment a-t-il pu commettre un acte aussi lâche envers toi ? Je suis vraiment désolée pour toi !
Cette pauvre fille avait craché son venin sans aucune hésitation. Puis elle avait raccroché très vite. Mais elle avait été ensuite prise de remords en pensant à la réaction de Romuald et, aussi, à la fragilité de Clothilde. Elle avait tout de suite regretté son geste. Elle avait réalisé que ce qu’elle venait de faire était monstrueux, une plaisanterie de très mauvais goût. Pourtant, il aurait été facile de dire la vérité à Clothilde, en lui avouant tout simplement le départ précipité de Romuald pour l’Espagne, au chevet de son père qui avait eu un infarctus. Elle avait repris le combiné pour rappeler Clothilde. Elle voulait s’excuser de lui avoir fait cette plaisanterie de si mauvais goût. Surtout, elle voulait lui donner les véritables raisons expliquant le silence de Romuald.
Mais elle n’avait pas réussi à joindre Clothilde au téléphone. Sa jalousie avait frappé Clothilde en plein cœur et, en agissant de la sorte, elle avait été stupide et machiavélique.
Clothilde, qui n’était déjà plus dans son état normal, avait été complètement anéantie. Tétanisée, assommée, elle s’était sentie vidée. Des larmes avaient coulé sur ses joues sans qu’elle ne s’en rendît compte. Elle n’arrivait pas à comprendre le geste de son fiancé : Lui qui disait l’aimer comme un fou s’était marié comme un lâche ! Comme elle avait été naïve ! Elle l’adorait, il représentait tout pour elle et, par-dessus tout, le père idéal des enfants qu’elle souhaitait avoir un jour.
Comme il avait été minable et vil, parce que, dans ses yeux, elle n’avait toujours vu que de l’amour ! Quel bon comédien ! Et durant tout ce temps-là, monsieur avait mené une double vie ! Son sang n’avait fait qu’un tour pour se refroidir à jamais. Et c’était ainsi que la pauvre Clothilde, si faible et si sensible, avait perdu toute raison de vivre.
Comme un automate, elle s’était levée, elle s’était dirigée vers l’ascenseur, comme guidée par une force négative. Quelque chose la poussait, elle seule savait vers quoi et elle avait suivi son instinct. Elle s’était arrêtée devant un placard, l’avait ouvert, avait pris le premier flacon qui lui était tombé sous la main, avait fait demi-tour et avait regagné sa chambre. Elle s’était assise sur le lit, avait ouvert le flacon de ce produit nocif, en avait bu tout le contenu sans faire une seule grimace, puis elle s’était allongée. C’était horrible, on aurait juré que Clothilde était déjà morte quand elle était sortie de la chambre pour se diriger vers ce maudit placard.
Pendant que Clothilde commettait l’irréparable, Gabrielle discutait tranquillement avec une jeune personne du groupe. Lorsque, soudain, elle avait ressenti une curieuse sensation. Un vent glacial lui avait parcouru le dos. Elle s’était retournée et avait aperçu une ombre, en regardant bien, elle avait reconnu Clothilde. Sa sœur lui avait fait des signes de la main en guise d’adieu, elle lui avait souri, son beau sourire était chargé de tristesse. Puis elle avait disparu.
Malgré cette mystérieuse vision, Gabrielle avait gardé tout son calme, mais son cœur s’était terriblement attristé. Elle avait compris que sa sœur n’était plus de ce monde et son cœur s’était mis à battre la chamade.
Lorsque Clothilde lui était apparue, Gabrielle n’en n’avait pas été vraiment surprise, parce que, dès l’instant où elle avait quitté sa sœur, celle-ci était restée présente dans son esprit.
Une autre personne que Gabrielle aurait trouvé cette apparition terrifiante. Mais Gabrielle, dans son for intérieur, savait qu’elle ne pouvait plus rien pour Clothilde, alors elle était restée sereine. Cette incroyable force et cette grande foi dont elle était dotée avait préparé son cœur à cette épreuve. Bien sûr, elle avait eu terriblement mal, mais son âme était en paix. Clothilde avait suivi sa voie et sa vie devait certainement s’achever à ce jour. C’était ainsi, il ne fallait pas se poser de questions. Il ne lui restait plus qu’à rentrer à l’hôtel.
En y arrivant, Gabrielle s’était précipitée vers la chambre en pensant malgré elle : « Oh ! Mon Dieu ! ce n’est pas possible ! Ma pauvre Clothilde, pourquoi ? »
Gabrielle avait su ce qui l’attendait, parce qu’en son âme et conscience, elle en avait eu la certitude, puisqu’elle avait vu sa sœur lui dire adieu !
Sa douce Clothilde était morte. Lorsqu’elle avait ouvert la porte de la chambre, elle l’avait vue, allongée sur son lit. Clothilde avait l’air endormi, son visage était serein, cependant, un rictus de regret marquait ses lèvres délicates.
Le téléphone s’était mis à sonner, Gabrielle avait décroché machinalement. C’était Inès, au bout du fil, qui demandait à parler à Clothilde avec insistance, elle avait quelque chose de très important à lui dire. Elle était tout excitée, elle souhaitait vivement s’excuser auprès de Clothilde, mais, surtout, l’informer sur le silence de Romuald, puisque, bien évidemment, tout ce qu’elle lui avait raconté n’était qu’une mauvaise blague. Alors, lorsque Gabrielle lui avait annoncé la triste nouvelle, la pauvre Inès était restée sans voix, puis elle avait rétorqué tout de même :
– Mais… Mais… Ce n’était qu’une blague idiote ! Ce n’est pas possible… je voulais rigoler… je voulais juste la rendre un peu jalouse… c’est tout !
Gabrielle avait supplié Inès de lui répéter tout ce qu’elle avait dit à sa sœur. Ce quelque chose qui l’avait choquée au point de lui causer tant de chagrin. Alors, Inès avait raconté à Gabrielle sa mauvaise blague : oui ! Ce stupide mensonge qui avait amené sa sœur à commettre ce geste abominable.
La pauvre Inès était dans tous ses états, car tout cela était arrivé à cause de sa jalousie. Alors, Gabrielle n’avait plus eu aucun doute sur cette fille, parce qu’elle avait enfin montré son véritable visage. En agissant ainsi, cette jeune femme avait montré qu’elle n’avait aucun sens de l’amitié et de l’honnêteté.
Gabrielle s’était alors mise à penser à ce vieux proverbe qui dit : « Le sorcier est le frère de la jalousie. » Hélas, cette triste histoire était venue, encore une fois, confirmer ce proverbe.
Toutefois, Inès était réellement attristée. Mais Gabrielle la trouvait tellement pathétique, qu’elle avait fini par lui rétorquer :
– Ma chère Inès, ça ne sert plus à rien de te lamenter, puisque le mal est fait !
La perspicacité et la clairvoyance de Gabrielle l’avaient bien informée sur cette jeune fille. Elle avait toujours su que cette personne n’apporterait à sa sœur que des ennuis.
Ainsi, comme une vipère, elle s’était introduite dans sa vie, avec toute sa fourberie et en semant son venin, elle avait gagné.
Clothilde était morte à cause de la jalousie et de la convoitise. Quelle lamentable tragédie ! Malgré tout, Gabrielle avait plaint Inès, parce qu’elle se retrouvait seule avec sa conscience.
Gabrielle s’était retrouvée seule, sa douce Clothilde n’étant plus de ce monde. Encore une fois, elle avait été touchée par un deuil. Mais elle avait eu une confiance inébranlable en sa foi, car cette force puissante et vivifiante avait été là encore une fois pour apaiser son cœur, pour l’aider à supporter ce chagrin et le grand vide que sa sœur lui avait laissé en la quittant si brutalement.
Clothilde était maintenant là où était sa place. Alors, les pensées de Gabrielle étaient allées vers ses grands-parents, pauvre Yaya ! pauvre papi Jo !

Ah ! Ces idées malsaines, ces maudites pensées négatives qui viennent toujours au bon moment et qui savent prendre le dessus à la moindre faiblesse de l’être ! En se faisant entendre avec cette voix autoritaire, mais néanmoins convaincante : « Vas-y ! venge-toi ! Tu dois disparaître et, comme cela, il culpabilisera toute sa vie ! Sors de la chambre, va au bout du couloir, il y a un placard, ouvre-le, tu trouveras tout ce qu’il te faut comme produits dangereux. Vas-y ! sers-toi ! Il ne te reste plus que ça à faire ! Il t’a humiliée, trahie, trompée. Souris et réjouis-toi en pensant que, durant toute sa vie, il aura mauvaise conscience ! Mais toi, tu ne seras plus malheureuse ! »
Ce misérable était arrivé à ses fins, ce mauvais génie, ce Malin qui sait profiter de la faiblesse des humains. Ce monstre prévaricateur convoitait l’âme de cette malheureuse et, avec l’aide de cette pauvre Inès qui avait été son instrument, il avait fini par avoir ce qu’il voulait. Clothilde n’avait pas été forte, car elle n’avait pas eu d’arme pour se défendre, sauf celle de la jalousie et de la haine. Mais, hélas, c’était exactement les dispositions requises pour le malin. Pauvre Clothilde ! Encore une victime de ce misérable ! En effet, la perfidie de ce misérable avait égaré cette pauvre innocente.
Gabrielle s’était rendu compte de cette déconcertante réalité que, mis à part la croyance, irrémédiablement, l’homme a le Mal qui sommeille en lui. C’est pour cela qu’il est essentiel pour tout individu de rester vigilant, parce que, pour le mauvais génie, au moment propice, il est toujours là, lorsque l’on se trouve dans un mauvais état d’esprit. Il est là, inévitablement, à suggérer ses ingénieuses et monstrueuses inventions pour nuire sans le moindre scrupule à toute âme troublée.

Effectivement, lorsque que l’on se trouve dans une très grande colère ou que l’on ressent une incroyable haine monter en soi, il ne faut jamais se laisser aller à perdre son sang-froid, parce que c’est la meilleure façon de sombrer dans le piège de la violence. Mais se ressaisir en aérant son esprit, en prenant une grande bouffée d’oxygène, c’est la solution efficace et néanmoins nécessaire, car l’air que l’on respire est le souffle divin, et cela suffit véritablement pour retrouver le contrôle de soi. Ainsi, tout naturellement, le calme revient aussi vite que cette mauvaise colère qui s’était installée pour nuire inévitablement. Cela est nécessaire pour que jamais la mauvaise conscience, le Malin, ne vienne dicter à l’homme sa conduite. Car ce fourbe connait toutes les ruses et les tromperies pour arriver à ses fins. Il est toujours aux aguets pour saisir la moindre occasion, parce que son unique but sur cette terre est de fourvoyer le plus d’âmes possibles.

Pauvre Clothilde ! jusqu’à la fin de sa vie elle aurait ignoré ce douloureux secret sur sa naissance. Cependant, dans son for intérieur, elle avait toujours ressenti que quelque chose de profond et de mystérieux l’anéantissait petit à petit. Ce vague à l’âme, ce manque, cette terrible mélancolie qui venait à chaque fois éteindre son joli sourire… Oui ! Le subconscient de Clothilde savait tout !
Gabrielle avait fini par savoir le grand secret que la famille avait cru bon de cacher, pour le bonheur de tous, croyaient-ils !
C’était à la suite d’une grande conversation avec Yaya sur Clothilde, que Gabrielle avait appris toute la vérité sur sa famille. Cela faisait exactement quatre ans que Clothilde n’était plus de ce monde. Ainsi, alors qu’elles discutaient, évoquant toutes les deux des souvenirs du passé, sa grand-mère lui avait demandé d’aller lui chercher un album de photos dans sa chambre à coucher. Et c’était en prenant cet album, que Gabrielle avait fait tomber ce porte-photo qui se trouvait sur la commode. Lorsqu’elle s’était penchée pour le ramasser avec empressement, une vielle photo jaunie s’était furtivement échappée de sa cachette. Ainsi, elle était tombée sur cette petite photo que Yaya avait dissimulée aux yeux et au su de tous. Gabrielle était revenue vers Yaya, les yeux arrondis de stupéfaction, parce qu’elle tenait dans sa main une photo où l’on voyait deux petites filles blondes qui souriaient à pleines dents. Elles se ressemblaient comme deux gouttes d’eau, elles semblaient avoir cinq ou six ans, sur la photo. Yaya avait semblé vraiment contrariée que Gabrielle fût tombée sur cette photo.
Gabrielle avait insisté pour avoir des explications sur cette vieille photo. C’était là que sa grand-mère s’était mise à pleurer, elle avait semblé affolée. Gabrielle ne comprenait plus rien, mais Yaya l’avait vite rassurée en lui disant que tout avait été de sa faute. Oui, c’était elle qui avait suggéré à Elisabeth et Jean d’adopter Clothilde, après la mort de Mathilde.

Cela faisait des années qu’Elisabeth et son mari désiraient un enfant et Gabrielle ne venait toujours pas. Alors, lorsque Mathilde était morte en donnant naissance à Clothilde, Joseph, son pauvre mari, ivre de douleur et de chagrin, était parti en abandonnant sa fille, sans lui jeter un seul regard.
La vérité était que Yaya et papi Jo avaient eu deux filles, ce qui voulait dire que la mère de Clothilde et celle de Gabrielle étaient des sœurs jumelles. L’explication que Yaya avait donnée sur la venue au monde de Clothilde avait d’emblée fait comprendre à Gabrielle d’où venait cette tristesse et cette mélancolie sur le visage de sa sœur. En vérité, Clothilde, dans son for intérieur, avait toujours ressenti qu’il lui manquait quelque chose dans ce monde.
D’après ce que Yaya avait dit à Gabrielle, lorsque le gynécologue avait annoncé la bonne nouvelle à Mathilde et à Joseph, sur le fait qu’ils attendaient un enfant, ça avait été la joie dans toute la famille. Mais, malheureusement, Mathilde était très fragile. D’emblée, son médecin l’avait avertie qu’elle risquait de perdre le bébé et que cette grossesse mettait aussi sa vie en danger. Aussi, Joseph, son mari, n’avait plus voulu entendre parler de cette grossesse à risque. Il aimait tellement sa femme, qu’il ne voulait en aucun cas risquer de la perdre. D’autant que lui, militaire de carrière, cela ne le dérangeait nullement de garder sa femme pour lui tout seul. Mais Mathilde, très entêtée, n’avait jamais voulu écouter qui que se soit et avait souhaité poursuivre sa grossesse.
Alors, durant toute sa grossesse, elle était restée allongée, puisque, dès qu’elle faisait un moindre effort, elle était à bout de souffle. À son huitième mois de grossesse, lorsqu’elle avait ressenti les premières douleurs, dans l’affolement, elle avait littéralement perdu connaissance. Heureusement qu’elle s’était installée chez Yaya durant tout ce temps-là !
Lorsqu’elle s’était retrouvée sur la table d’accouchement, à l’hôpital, elle avait souffert le martyr. Malgré toute cette souffrance, elle avait refusé la césarienne que son gynécologue avait voulu pratiquer sur elle. Mathilde avait voulu vivre son accouchement, bien qu’elle ait su tous les risques auxquels elle s’exposait. Elle s’était affaiblie irrémédiablement, parce que son rythme cardiaque diminuait, mais elle s’était obstinée, au mépris du danger. Après une journée de souffrance, elle avait fini par accoucher, hélas, quelques minutes après la délivrance, son cœur s’était arrêté de battre.
Joseph, son mari, qui avait accouru à son chevet, avait assisté à son obstination sans rien dire. Il n’avait pas compris le comportement de sa femme : c’était comme si Mathilde avait décidé de ne pas vivre sans le plaisir de mettre au monde son enfant. Ainsi, le comportement de sa femme l’avait interpellé. Et il avait compris que sa femme avait choisi entre lui et le bébé, parce que Mathilde savait ce qu’elle risquait en voulant poursuivre cette grossesse, alors, pour lui, cela avait représenté un véritable aveu. Il était resté jusqu’aux obsèques de Mathilde, puis il était reparti en disant d’un air résigné à Yaya que cet enfant lui avait tout pris et que jamais plus il ne voudrait en entendre parler.
Le pauvre Joseph était reparti dans sa caserne sans ajouter un seul mot. Les grands-parents de Gabrielle n’avaient plus jamais entendu parler de lui. Puis, un jour, cela faisait un peu plus de deux ans que Mathilde était décédée, Yaya avait reçu une lettre de l’armée lui signalant que son gendre Joseph Dente, qui faisait parti d’un commando, avait trouvé la mort dans l’exercice de ses fonctions.
Pauvre Clothilde ! Toute cette tristesse dans ses yeux n’était pas là par hasard ! Gabrielle avait remercié Yaya de lui avoir tout dit. Alors, elle avait vu et ressenti un grand soulagement dans les yeux de sa grand-mère.

Il y a un jour, dans la vie, où dire la vérité est plus que nécessaire. Ainsi, Gabrielle aussi avait eu à se confier à son ami. Benjamin avait dû être mis au courant de ses projets, du sens qu’elle comptait donner à sa vie, de sa complète dévotion !
Et Benjamin, de son côté, avait dû absolument la comprendre. Gabrielle lui avait fait confiance. Car elle ne désirait rien d’autre dans la vie que de suivre la voie extraordinaire qu’elle avait choisis de suivre.
Ainsi, armée de tout son courage, Gabrielle avait affronté son cher Benjamin. Et son ami l’avait écouté sagement. Ainsi, il avait comprit qu’il n’avait aucune chance de construire quelque chose avec elle dans l’avenir.
Benjamin avait vu tellement de détermination dans les yeux de Gabrielle, qu’il n’avait pas insisté pour avoir plus de précisions. Cependant, il s’était mis à l’observer longuement. Et c’était à ce moment là, qu’il avait enfin compris la véritable raison de cette expression enfantine et mystérieuse qui émanait sans cesse du visage de Gabrielle. Aussi, durant un court instant Benjamin l’avait regardé comme s’il la voyait pour la première fois. Elle avait elle aussi véritablement remarqué dans le regard de son ami une expression interrogative. Elle semblait être devenue une étrangère pour lui, car plus il la regardait, plus elle se sentait scrutée. Ce qui l’avait confortée dans sa détermination, parce que son ami l’avait aperçue enfin comme elle avait toujours souhaité qu’il la vît.
Benjamin avait compris tout ce que Gabrielle lui avait dit et ce qu’elle attendait de lui. Malgré son cœur meurtri, il avait réalisé la chance qu’il avait eu de rencontrer une fille comme elle. Ainsi, tout avait été clair dans sa tête et toutes les questions et les doutes sur son amie s’étaient dissipés.
Certes, Gabrielle lui avait ouvert son cœur, mais pas une seule fois elle ne l’avait encouragé dans la voie que lui-même avait envisagé. Ils avaient passé tellement de temps ensemble ! Sa cher Gabrielle était devenue sa lumière, sa joie de vivre. Comment aurait-il pu vivre désormais ? Il appréciait tellement sa compagnie et leurs interminables conversations sur les choses de la vie, et tout cela lui manquerait terriblement !
Bien évidemment, il avait toujours trouvé Gabrielle surprenante de vérité. Et, des propos de son amie, il ne sortait jamais que du positif. Et il avait aussi constaté depuis longtemps cette force tranquille qu’elle dégageait. Oui, il l’avait toujours trouvée étonnante de vérité, il avait aussi remarqué son incroyable faculté d’adaptation. La douceur réconfortante de Gabrielle le désarmait à chaque instant. Elle savait si bien mettre les personnes en confiance, elle se trouvait toujours au bon endroit et au bon moment, lorsque cela semblait nécessaire, elle était extraordinaire !
Benjamin avait fini par se rendre à l’évidence. Il la connaissait beaucoup plus qu’il ne le pensait. Cependant, depuis le jour où il avait fait sa connaissance, il l’avait toujours regardée avec les yeux de l’amour. Ce qui voulait dire que, naturellement, il n’avait pu voir que la sensualité qu’elle dégageait.
Ben avait su que, désormais, durant toute sa vie, il garderait de Gabrielle l’image d’une jeune fille mystérieuse. Il savait qui elle était vraiment, il avait compris le sens exact de ses mots et de ses projets.
De son côté, Gabrielle savait qu’en révélant ses véritables projets à Benjamin, elle le perdrait pour toujours, parce que les sentiments qu’il éprouvait pour elle étaient trop intenses.
Aussi, il ne fut plus question que Benjamin se retrouvât dans la même pièce que Gabrielle. Travailler dans cet hôpital était devenu un véritable calvaire pour lui. Benjamin avait fini par faire appel à toutes ses relations pour changer de lieu de travail. Après son départ, plus jamais Gabrielle n’avait entendu parler de lui.

Lorsque Gabrielle perdait un proche, sa foi se renforçait. Et tout cela l’aidait à chaque fois à mieux comprendre, à analyser et, surtout, à donner un vrai sens à sa vie. Car il n’était pas question pour elle de tomber dans ce système laxiste en regardant en arrière.
Or, aujourd’hui, cette civilisation fonctionne à l’extrême et l’homme s’expose de plus en plus au danger, parce qu’il se veut performant avant tout. Alors, il cherche à aller toujours plus loin et au-delà de ses limites. Et, pour cela, s’il le faut, il est prêt à se damner. Mais ce que l’homme n’a toujours pas compris, c’est que, dans sa quête d’abondance et d’absolu, et dans sa lutte acharnée contre vents et marées, il trouvera devant lui exactement la même chose que tous ceux qui l’ont précédé, c’est-à-dire, ce grand vide, cette chose que l’on appelle le néant. Car l’homme, dans sa vanité, restera à jamais égal à lui-même, c'est-à-dire, un éternel insatisfait, parce que son obsession principale sera toujours la convoitise. Malheureusement, la rage et l’exaspération étant l’essence du mal, elles poussent l’homme à l’extrême dans son abomination.
Dans cette vie dissolue où certains adultes semblent oublier le sens exact du mot famille, où beaucoup d’enfants sont désormais livrés à eux-mêmes, rien ne va plus. Car, malheureusement, il n’y a plus de place pour la patience, la tolérance et encore moins pour la vertu.
À cause de cette impatience, la vie de nombreuses personnes bascule irrémédiablement.
Les exemples ne manquent pas, mais les plus graves se sont les agressions commises sur les enfants. Pour Gabrielle, ces gestes sont impardonnables et intolérables. Hélas, ce grave malheur arrive beaucoup plus souvent qu’on ne le croit.
Bien évidemment, toutes ces choses n’arrivent jamais par hasard, car la méchanceté envahit et trouble tellement d’âmes fragiles !
C’est ainsi qu’une personne fragile, énervée, peut se transformer en bête humaine. Car il voit d’un mauvais œil son enfant plus turbulent que jamais. Il suffirait pourtant d’une petite phrase pour calmer cet enfant et, par la même occasion, avoir la paix tant désirée. Mais non, cela est trop facile, alors, la méchanceté est là, oui, cette petite voix opportune qui est là au bon moment et qui attise la colère. Le malin suggère avec perfidie la solution fatale à cette personne sans défense. Et brusquement, elle devient méchante, elle se met à cogner violemment sur ce pauvre petit être si fragile et, pour finir, le balance (contre un mur, dans son berceau…). Et voilà ! Encore une fois, il a gagné, car depuis toujours, c’est sa façon de procéder pour perdre les insensés. Et lorsque cette personne reprend ses esprits, il est trop tard, car malheureusement vient de commettre un véritable crime.
Ou encore, lors d’une simple dispute entre conjoints, il est là, soufflant les mots les plus blessants et qui finissent toujours par atteindre l’autre au plus profond de son être. Ce qui, bien évidemment, rend amer et provoque le plus souvent ruptures et divorces, ce qui veut dire, famille brisée et enfants malheureux. Et tant d’autres méchancetés gratuites, qui finissent par faire le malheur de l’homme ! De tout cela, il se réjouit, ce mécréant, car l’homme, dans sa quête de liberté absolue, a oublié Dieu, son protecteur.

Gabrielle se demandait sans cesse : « Que sont devenus les enfants du Seigneur, pourquoi l’ont-ils oublié ? C’est une certitude, beaucoup d’hommes l’ont complètement banni de leur cœur. Oui ! Ils l’ont chassé de leur mémoire, Dieu, la source de vie ! »
Dans sa clairvoyance, Gabrielle a remarqué que l’homme est véritablement l’être le plus ingrat de la création. Car, d’après lui, la meilleure façon de vivre sa vie, c’est de la vivre tranquillement, sans contraintes ni tabous et en ignorant purement et simplement tous les préceptes de vie. Ainsi, l’homme, ce prétentieux, pense qu’il est arrivé tout seul sur la terre et, de ce fait, qu’il ne doit rien à personne.
Dommage ! Car en agissant de la sorte, il se met à coup sûr à la portée de ce mauvais génie, qui est là sans cesse à l’épier. Et, malheureusement pour l’homme, rien ne peut l’empêcher de venir prendre possession de son esprit, pour ensuite le manipuler comme un pantin. Car, sans le vouloir, les âmes commettent toutes sortes d’abominations !
Pourtant, si on cherche la vérité, l’espoir renaît. Depuis toujours, lorsque vient la nuit, Dieu sonde le cœur de ses brebis et tous ceux que le Seigneur trouve sincère, renaissent à nouveau. Et Gabrielle est persuadée qu’il n’est jamais trop tard pour se remettre en question !

Inlassablement elle rêve de voir dans les yeux de tout être humain cette éclatante lueur d’espoir qui habite ceux qui ont une véritable foi en eux. Cette étincelle qui s’appelle l’amour, car c’est l’outil absolue pour lutter, pour avancer dans la vie avec sérénité et sans aucune crainte.
Le destin de chacun suit son cours inévitablement. Ce qui veut dire que, lorsque quelque chose doit arriver, irrémédiablement, cette chose s’accomplis. Et l’homme, malgré son intelligence suprême, n’y peut rien. Malgré tout, il s’obstine inlassablement devant cet état de chose en se disant : « si je… si on… », toujours la même réplique et cela depuis la nuit des temps.
Pourtant, l’homme sait pertinemment, tout au fond de son cœur, qu’il n’y a aucune question à se poser, qu’il faut se rendre à cette inévitable destinée. Car il est et sera toujours impuissant devant ce grand mystère qu’est l’humanité. Et, à jamais, il subira cette inévitable réalité qu’est la loi divine. Ainsi, accepter son destin sans se poser de questions est le seul recours, car tout est lié !.
Pour Gabrielle, la mort n’a jamais été un sujet tabou, parce que, depuis longtemps, elle a appris à vivre avec. Néanmoins, elle a sa conviction personnelle sur le sujet : « Un jour, l’homme naît et Dieu lui donne ce souffle de vie. Et ce jour-là, il arrive avec sa destinée écrite dans la paume de sa main. C’est pour cela que tant de force et de magnétisme se dégagent de ses mains. Alors, pourquoi appréhender ou se lamenter sur quelque chose qui est programmé et qui arrivera, qu’on le veuille ou non ? »
Toutefois, lorsqu’on a une véritable foi, une grande confiance en la vie, alors le cœur dégage une incroyable sérénité. C’est ainsi qu’est Gabrielle, elle n’appréhende pas les funestes présages, car rien ne lui parait dramatique.
Cependant, vivre en toute confiance ne veut pas dire pour elle vivre comme certaines personnes, qui pensent que tout leur est acquis. Certes, ces individus ont richesse et notoriété, alors, bien évidemment, rien ne peut venir les atteindre dans leur grandeur et leur suffisance, mais inévitablement, dans son immense orgueil, l’homme voit cette triste réalité : sa condition de pauvre mortel. Et devant cette fatalité, petits et grands restent égaux, poussière ils sont ! Poussière ils resteront !

« Écoutez ceci, vous tous, peuples,
Prêtez l’oreille, vous tous, habitants du monde,
Aussi bien gens du commun que gens de condition,
Ensemble, riches et pauvres.
Ma bouche va proférer la sagesse,
Et la méditation de mon cœur, la vérité.
Je prête l’oreille à la sentence ;
Au son de la harpe, j’explique mon énigme.
Pourquoi craindrais-je aux jours du malheur,
Lorsque l’iniquité de mes perfides adversaires m’environne ?
Ils se fient à leurs richesses,
Et ils se font gloire de leur grande fortune.
Nul pourtant ne peut se racheter,
Ni payer à Dieu le prix de sa rançon. »
(Ps. 49-2,8)


Certes, la mort est effrayante ! En effet, il est souvent très dur d’en parler avec une personne qui vient tout juste d’être touchée personnellement par un deuil. Parce que, perdre un être cher est quelque chose de terrible, cette personne a l’impression d’avoir perdu une partie de son corps, elle ressent un terrible manque. Oui, elle se sent vidée, elle est perdue, elle a le cœur déchiré, en lambeaux, elle se retrouve effroyablement seule avec son chagrin. Alors, elle en vient à se poser cette question : « Que me reste-t-il maintenant, à part mes yeux pour pleurer ? » En effet, face à cette épreuve, la réalité de la vie est là, lui éclatant au visage.
Aussi, cette personne se met à se poser de véritables questions : « Que sommes-nous sur cette terre ? Pourquoi sommes-nous là ? » Et bien d’autres questions, qui sont néanmoins inutiles, puisqu’elles restent toujours en suspens. Cependant, dans la vie, toute peine n’arrive jamais sans raison. Car, c’est souvent après un malheur que l’homme prend réellement conscience de sa vie et de celle qu’il a menée jusqu’à ce temps de réflexion. Alors, il fait un travail sur lui, il corrige sa façon de vivre et, quelques fois, il fait le vide autour de lui. Et tout cela lui apporte assurément une formidable sérénité. Car, malheureusement, c’est souvent après un deuil que l’on remarque ses vrais amis, parce que, à son cœur défendant, le deuil peut-être parfois une thérapie.
Certes, tout cela semble dur à entendre, mais c’est ainsi, parce qu’à part le Créateur, rien ne peut venir arrêter le cycle du temps. Car, après un jour vient un autre jour et, inlassablement, la vie suit son cours. Et, petit à petit, avec le temps, le chagrin s’estompe.
C’est ainsi depuis que le monde est monde, car la vie nous est prêtée, mais jamais donnée. Le destin de l’homme est là, à le suivre comme son ombre. Et lorsque son heure arrive, Dieu souffle sur cette petite poussière d’étoile et il disparaît.

« En effet, j’ai pris tout ceci à cœur,
et en expérimentant tout cela :
Que les justes, les sages et leurs œuvres
Sont dans la main de Dieu ;
Est-ce amour, est-ce haine ? L’homme ne sait pas,
Puisque pour tous c’est le même sort,
Pour le juste et pour le méchant,
Pour le bon, pour le pur et pour l’impur,
Pour celui qui sacrifie et pour celui qui ne sacrifie pas ;
Bon ou pécheur, c’est tout pareil,
Le jureur comme celui qui respecte le serment.
C’est un mal, en tout ce qui se fait sous le soleil,
Qu’il y ait un même sort pour tous ;
Aussi bien le cœur des fils de l’homme est plein de malice,
Et la déraison est dans le cœur pendant la vie ;
Après quoi ils vont chez les morts :
À qui donc se joindre ?
Pour tous les vivants, il y a de l’espérance. »
(L’Ecc. 9-1,4)


Dans la vie, chacun reçoit ce qui lui est dû et cela durant toute sa vie, parce que la vie est une surprise, qu’elle soit bonne ou mauvaise. Et, à chaque instant, nul ne sait ce qui l’attend.
On peut aussi méditer sur cette jolie phrase d’un musicien cubain, qui répond au nom de Pépin Vaillant : « Lutte pour la vie, parce que la mort est certaine. »
Alors, vivre bien avec son entourage, dans l’honneur et le respect, sans aucune crainte, avec ses enfants, ses parents et ses amis, en s’aimant mais, surtout, sans jalousie ni haine.
L’homme est averti par les saintes écritures qu’il ne faut plus pleurer pour ceux qui meurent. Car, à partir du moment où ils partent, ils sont apaisés, libérés des tourments. Car pour eux la crainte et la souffrance n’existent plus, parce qu’a ce moment toutes peines terrestres ont disparu. Le royaume des cieux est à eux et cette sensation merveilleuse, ce bien-être, cet amour infini qu’ils ressentent, c’est cela la lumière éternelle qui attend tout être de bonne volonté.
L’homme est sur terre pour y vivre en toute liberté, aussi bien avec ses qualités qu’avec ses défauts, cela s’appelle : Tolérance !

En créant l’homme, Dieu lui a fait don de cette vaste terre, ce qui, de toute évidence, laisse à penser qu’il y a de la place pour tous. Puis, Il l’a doté de quelque chose de formidable : sa conscience. Ainsi, son imagination a toujours dépassé ses connaissances. Car, depuis sa création, l’homme a toujours été guidé et grâce à cela, il arrive à accomplir des merveilles sur la terre.
Malheureusement, aujourd’hui, l’homme est en train de détruire cette formidable planète. Car, à cause de son imperfection, tout ce qu’il fait maintenant est nuisible à lui-même et à la nature.
En se rapprochant de plus en plus de ses semblables et en les observant, Gabrielle s’est persuadée d’une chose, c’est que l’homme vit en suivant plus ou moins sa conscience. Mais, pour elle, l’homme devrait suivre avant tout une conduite digne de sa nature, parce que, tôt ou tard, le destin de chacun le rattrape. Elle reste persuadée que toute personne, en son âme et conscience, est assez avisée pour mener sa vie comme elle l’entend.
Certes, à ce jour, l’homme entend et comprend ce qu’il veut, mais, surtout, il interprète les choses comme ça l’arrange. Néanmoins, tout au fond de son cœur, sa conscience l’interroge sans cesse, parce que, chez l’homme, la raison est innée, viscérale. Même s’il se bat pour l’ignorer, l’état de son âme est là pour le lui rappeler. Car, tout au fond de son être, il y aura toujours cette petite voix amicale qui l’interpellera !

Gabrielle porte une attention toute particulière aux enfants. Et elle en a fait sa mission principale : soigner et protéger ces petits innocents est une tâche qui donne beaucoup de sens à sa vie. Elle aime tellement les voir heureux, joyeux et débordant de sérénité ! Et, de leur côté, ces petites âmes lui apportent tellement d’amour et de chaleur ! Lorsqu’elle entend leurs rires, leurs cris et même leurs jérémiades, elle est à chaque fois pleine de bonheur et de joie. Oui ! Elle jubile en leur compagnie, parce qu’ils lui apportent exactement ce qu’elle attend : de l’amour, toute la chaleur qu’un enfant apporte à ceux qu’il aime. Oui, de l’amour, rien que de l’amour, car leur petit cœur déborde de cette lumière, de cette source inépuisable qui illumine et fait pétiller leurs yeux. Et en se noyant dans leurs regards enfantins et joyeux, Gabrielle aperçoit à chaque fois le reflet de leur âme innocente et pure. Ainsi, plus que jamais, elle se sent en paix.
Ces petits amours qu’elle aime, qui lui donnent tant d’affection, c’est son énergie vitale, sa source inépuisable d’espoir. Avec eux, elle est au paroxysme de l’amour. Ces petits bouts de chou si fragiles et si forts à la fois font la joie et la fierté de beaucoup de parents. Mais, malheureusement ils sont aussi les souffre-douleur pour certains et des marchandises pour d’autres. Parce que tous ces horribles méfaits commis sur ces petits innocents sont inacceptables pour Gabrielle, à chaque fois qu’elle en a était témoin, son cœur meurtri à crier : « Honte à cette société qui laisse tant de vilaines choses arriver à des enfants ! »
Ainsi, lorsqu’elle a l’occasion d’être là pour eux, elle fait le maximum pour leur bien-être. Elle les voit si frêles devant ces adultes sans pitié, qu’elle les entoure d’amour, elle les rassure et elle les apaise, lorsqu’elle leur trouve le regard triste et inquiet. Lorsqu’elle voit arriver dans son service ces petits corps inertes, meurtris, brûlés, cassés et choqués, avec le regard chargé de souffrance et de reproche, elle est à chaque fois durement éprouvée par tant de cruauté, et, malgré sa sérénité, son sang ne fait qu’un tour.
Aussi, elle se pose à chaque fois la même question : « Comment l’être humain, l’être que Dieu a fait à son image, peut-il arriver à des gestes aussi avilissants ? » Heureusement que le personnel savait les entourer d’amour, d’affection et, surtout, de beaucoup d’attention ! Ce qui finit par leur faire retrouver leur beau sourire innocent.
Gabrielle arrivait à faire plus encore, car elle parvenait le plus souvent à leur redonner espoir. Oui ! Elle leur expliquait la nature humaine et son côté positif. Elle philosophait en leur expliquant qu’effectivement la méchanceté avait toujours existé de par le monde car, c’était cela le mal, mais que le bien existait aussi. Aussi, heureusement qu’ils étaient encore des enfants et que c’était eux l’avenir d’un monde meilleur ! Certes, ce gène du bien et du mal demeurerait en tout homme, néanmoins, en cultivant le bien on pourrait diminuer le mal et en faire abstraction.
Par conséquent, si ces enfants grandissaient en gardant toujours confiance en eux, ils verraient que la vie pouvait être belle et douce aussi. Parce que l’amour, l’espoir et la foi en soi sont les meilleurs outils pour avancer dans la vie en toute sérénité. Car, aller de l’avant sans jamais regarder en arrière sera toujours le meilleur atout de l’homme pour réussir sa vie.
Cependant, il y a aussi une chose très importante, cela concerne le regret et la haine. C’est que la haine durcit le cœur de l’homme et le rend encore plus aigri et méchant. Aussi, il ne faut jamais penser à rendre le mal que l’on nous fait, parce que la vengeance n’a rien d’exaltant, mais, tout au contraire, rend le monde plus misérable encore. Par contre, le pardon, la dignité, l’humilité, la tolérance et l’amour sont les grandes richesses de l’âme.
Gabrielle était quelques fois étonnée de voir comme les enfants l’écoutaient avec fascination. Ces petits amours semblaient l’aimer tellement, que tout ce qu’elle leur disait les intéressait. Et, de plus, elle savait être didactique, ils comprenaient ses mots. Ils aimaient entendre ses sages paroles, elle voyait leur regard s’adoucir en l’écoutant, les sourires revenaient et, dans leurs yeux innocents, elle voyait une formidable lueur d’espoir. Oui, son incroyable douceur leur apportait à chaque fois cet amour qui leur manquait tant. Elle aimait aussi leur raconter de belles histoires, ce qui animait leurs cœurs meurtris, elle aimait les voir vibrer de bonheur.
Gabrielle savait aussi que tout partait de l’éducation que l’on recevait et de ce fait, l’enfant élevé dans le respect, dans l’amour et la tolérance, a plus de chance de grandir et de vivre avec un sentiment noble ancré au plus profond de son être. Ainsi, en devenant un homme il vivrait dans une belle harmonie, parce qu’il aurait l’amour pour seul héritage. Quant à la haine et à la méchanceté, il l’en aurait tout simplement en horreur.
A suivre!

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Je suis une mère de famille nombreuse qui aime lire et écrire. J'ai créé ce blog, parce que j'avais envie de parler de belles choses, c'est-à-dire d'amour, d'attention, de tolérance. En somme, tout ce qui anime et qui met notre cœur en joie. Je l'ai créé aussi pour vous parler de mon premier roman Le Hasard Est Ecrit J'ai mis quelques lignes pour vous donner une idée de l'histoire. Cependant,dites-vous bien que l'essentiel est à l'intérieur. Bonne lecture à tous!